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Concertation

#1 22-10-2006 15:45:06

bato
Tour Gan
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Concertation

Comme ce sujet semble manquer sur pss (et que ça m'a été sugéré A5 ) je lance un nouveau thread sur la concertation.
Vaste sujet éminemment politique ( nous garderons bien sûr ici une entière neutralité) qui part d'une très bonne idée mais qui semble parfois atteindre ses limites comme pour le projet des halles.

La concertation en architecture et en urbanisme est à la mode depuis plusieurs années déja et part de l'idée donner la possiblité à chacun de s'exprimer sur un nouveau projet. L'idée de départ était donc de ne plus élaborer un projet entre professionnels et politiques mais de demander l'avis des riverains et de toutes les personnes concernées par un futur bâtiment ou quartier afin qu'il convienne au plus grand nombre.

Cette volonté est tout à fait louable, il est essentiel dans une démocratie que chacun puisse s'exprimer mais il peut être très dangereux pour les ambitions architecturales de se laisser dépasser par l'intérêt privé de telle personne ou telle association.

Plus concretement la concertation existe sous plusieurs formes. Le projet des halles à Paris en est une première illustration. Ici la concertation a été organisée sous la forme d'une exposition des quatre projets (Nouvel, Mangin, MVRDV/Winny Maas et OMA/ Rem Koolhaas) ou les visiteurs étaient invité0101010101s à laisser leur avis. Pour les halles on ne pouvait faire une concertation plus large : habitants du quartier, de Paris, de la région et même touristes se sont exprimés. Là ou le bas blesse c'est qu'au delà de cette concertation les associations locales ont su se faire entendre plus que les milliers de personnes qui ont répondu. Organisées en groupes de pressions ayant pour seul but de défendre leurs intérêts et non l'intérêt général, celles-ci ont contraint Monsieur Delanoé à choisir le projet Mangin, projet le moins ambitieux et le plus conservateur. Delanoé aurait bien sûr pu choisir un autre projet (la concertation consiste juste à demander l'avis pas à l'appliquer) mais il aurait été vivement critiqué par des électeurs potentiels. Il a certes été critiqué par une grande partie des professionnels et de ceux qui s'intéressent à l'architecture mais c'était moins dangereux politiquement. Delanoé à ici manqué de courage politique, il a choisi le projet Mangin alors qu'il préferait ceux de Koolhass et Nouvel afin de ne pas froisser une minorité bruyante mais en réalité peu représentative. En effet les opposants à un projet même s'ils sont minoritaires montent plus à la tribune que ses partisants.

La deuxième forme de concertation, celle à laquelle je suis confronté régulierement dans le cadre professionnel, est organisée en "groupes de travail". Le projet sur lequel je travaille est présenté sous quatre éclairages différents ( développement durable, développement économique, programmation et espaces publics) à des associations locales sous l'égide de la mairie. Ces groupes de travail réagissent au projet pendant ces réunions, donnent leur avis, leurs idées afin que toutes les parties puissent arriver à un certain concensus.
Ce qui me gène ici c'est la représentativité des associations dans le sens ou celles-ci sont issues des classes supérieures éclairées qui sont une partie minoritaire de la population locale. Comment peuvent elles donc parler au nom de la totalité de la population concernée par le projet? Je ne dis pas que les évolutions adoptées suite à l'impulsion des associations sont mauvaises, au contraire elles sont bonnes... mais seulement pour ceux qui les défendent..

Voila pour le lancement du thread sur la concertation. Cette dernière est essentielle mais il est plus qu'important de veiller à que tous soit entendus même si on ne peux voter à la place de ceux qui ne s'expriment pas. Encore une fois s'il y a avait eu concertation, aurait on aujourd'hui la Tour Eiffel et Beaubourg?

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#2 22-10-2006 16:26:04

le renard
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Re: Concertation

bato a écrit:

Ce qui me gène ici c'est la représentativité des associations dans le sens ou celles-ci sont issues des classes supérieures éclairées qui sont une partie minoritaire de la population locale. Comment peuvent elles donc parler au nom de la totalité de la population concernée par le projet?

Tout-à-fait d'accord B6
C'est là où le concept de 'démocratie participative' me semble démagogique. S'il est censé donner davantage de place à chacun dans les processus de décision politique, dans les faits c'est un pouvoir accru pour les élites (par rapport à la démocratie représentative). La transparence n'est pas non plus supérieure : le travail des lobbies ne se fait pas au grand jour, si ce n'est quand l'usage des médias s'impose pour faire avancer leurs causes. Ensuite, quand le processus de décision politique est noyé dans le consensus, c'est une politique du moindre risque qui est à l'oeuvre : ça n'est pas neutre et ça n'a rien à voir non plus avec l'intérêt général, mais puisque aujourd'hui on ne sait plus définir ce dernier, certains préfèrent lui substituer la somme d'intérêts individuels/communautaires/de classes, c'est plus commode...


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#3 22-10-2006 18:33:40

venise
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Re: Concertation

Si la représentativité des associations peut poser problème, surtout au niveau local, c'est toutefois rarement d'un point de vue social ; il suffit de se sentir impliqué, mais il est aussi nécessaire d'être disponible, ce qui fait qu'il y a plus de retraités que personnes qui travaillent, mais ce n'est pas une question de classe supérieure, éclairée ou nom, et de toute façon, elle ne sont pas fermées...; mais leur influence peut facilement être détournée au profit de quelques uns plus actifs que les autres ; elles sont ainsi un moindre mal, au niveau de la concertation, mais ne peuvent incarner la seule voie pour une démocratie participative. Les enquêtes publiques en sont une autre, mais elles sont le plus souvent confidentielles, avec une publicité si réduite qu'en fait la plupart des gens concernés les ignorent, ce qui laisse la voie libre aux élus. Car en fait la tentation d'un élu est toujours de décider tout seul, organiser une concertation c'est prendre le risque que d'autres soient d'un avis contraire, d'où le fait qu'elles soient le plus souvent de fait verrouillées.

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#4 22-10-2006 20:08:16

le renard
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Re: Concertation

venise a écrit:

Les enquêtes publiques en sont une autre, mais elles sont le plus souvent confidentielles, avec une publicité si réduite qu'en fait la plupart des gens concernés les ignorent, ce qui laisse la voie libre aux élus. Car en fait la tentation d'un élu est toujours de décider tout seul, organiser une concertation c'est prendre le risque que d'autres soient d'un avis contraire, d'où le fait qu'elles soient le plus souvent de fait verrouillées.

Les enquêtes publiques sont rarement confidentielles : l'information sur leur tenue est abondamment relayée par la presse locale comme par la communication institutionnelle. Et pour cause, les élus (qui préféreraient décider seuls, là on est d'accord) savent bien qu'en taisant cette information, seuls les mieux renseignés s'exprimeront, et que ces derniers sont le plus souvent d'avis contraire : la sauvegarde d'intérêts particuliers (nimbyisme...) est hélas plus mobilisatrice que la définition d'un projet d'intérêt général.


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#5 22-10-2006 21:19:22

Boris_F
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Re: Concertation

C'est toute la nuance qui existe entre la légitimité du peuple vue au travers du prisme de la démocratie participative (tapissée de démagogie et de "gouvernance", avec tout un tas d'associations d'individualistes réacs autour), ou de la démocratie représentative, la seule qui soit inscrite dans la Constitution jusqu'à nouvel ordre et donc qui soit, comme telle, réellement institutionnelle... 

Cette dernière ne devrait pas, si elle était bien menée, écarter toute idée de proximité. Elle devrait juste étouffer le nimbisme, ce qui n'a rien à voir... Je n'ai en effet jamais compris pourquoi une association devrait être considérée comme plus citoyenne qu'un citoyen, et donc pourquoi elle devrait avoir le moindre pouvoir institutionnel qui prendrait le pas sur les autres citoyens - sauf dans un état en autogestion, bonjour le délire... On tombe vite fait dans la vérité du nombre que Sartre décriait justement...

Nous avions un sujet sur les nimbies qui se rapprochait un peu de celui-ci : https://www.pss-archi.eu/forum/viewtopic.php?id=10962


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#6 23-10-2006 21:22:13

NouvelAngevin
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Re: Concertation

Ce concept de nimbisme revient souvent dans les conversations. Je vois bien ce qu'il recouvre, et son utilité pratique, mais je me demande s'il est aussi pertinent qu'il en a l'air et s'il ne biaise pas la réflexion.

Si j'ai bien compris, ce sont des sales types organisés en association pour défendre leur intérêt particulier contre l'intérêt général.
Mais l'intérêt général, jusqu'à nouvel ordre, inclut les intérêts individuels. Je ne dis pas qu'il s'y réduit, ni qu'il est un simple agrégat d'intérêts individuels, mais simplement qu'il l'inclut. Et qu'il inclut donc l'intérêt particulier des nimbis (numbis ? nymbis ? d'où vient ce terme ?).
Qu'en d'autres termes, il est dangereux de disqualifier ce dernier comme illégitime.

Au yeux d'un régime totalitaire, un dissident n'est-il pas un "nimbi" ? Les indépendantistes ne sont-ils pas des combattants légimites pour les uns et des terroristes pour les autres ?

A quel moment l'intérêt particulier d'un groupe doit-il prévaloir ou ne plus prévaloir sur l'intérêt d'un groupe plus grand ? Il me semble qu'il faut être assez délicat avec ce genre de pb là, car on passe vite le Rubicon séparant la démocratie de la dictature (d'un homme, d'un groupe, d'un maire, d'une classe sociale, etc.).

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#7 23-10-2006 23:53:02

le renard
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Re: Concertation

Pour définir l'intérêt général d'un projet, il faut prendre en compte les intérêts particuliers ou communautaires (et non les inclure dans le projet, nuance), en revanche il ne peut pas se conformer à un intérêt particulier (La Palisse n'aurait pas dit mieux D4 ).

Pour NIMBY (pour Not In My Back Yard : pas dans mon jardin), voir la définition (succincte) de Wikipedia :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Nimby
C'est un phénomène né aux USA au début des années 80, qui a fait couler beaucoup d'encre et servi de support à bien des études sociologiques depuis. Pas une vue de l'esprit, donc...

Des nimbies ne luttent pas contre un projet mais seulement contre sa localisation dans leur voisinage. Comme tu vois, la définition est très précise et ne permet pas d'assimiler tous les 'antis' à des nimbies. Les nimbies ne s'opposent pas au nom d'une autre conception du progrès, pour la sauvegarde de l'environnement ou du patrimoine (même s'ils peuvent récupérer ces thèmes pour faire avancer leur cause). Une association de nimbies travaille à des fins purement égoïstes et l'intérêt qu'elle défend (pour simplifier : ok pour le projet mais pas chez moi) n'est pas compatible avec la recherche d'un consensus pour la définition d'un (forcément imparfait) intérêt général.

A part ça, il faut aussi compter avec les NIMEY, les NIMTOO, les LULU, les NOPE, les SLAPP, les ...
http://perso.orange.fr/algoric/old/slid … imby02.htm


PS : pas la peine d'invoquer le totalitarisme (attention, on approche du point Godwin ! E1 )

Dernière modification par le renard des volumes (24-10-2006 02:11:46)


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#8 24-10-2006 08:25:25

venise
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Re: Concertation

Ce que je vois surtout, dans ces appelations de nimbies ou ces contestations du rôle des associations locales, surtout celles qui sont créés spontanément à cause d'un projet, c'est bien souvent une stigmatisation des opposants, des gêneurs. C'est très facile de minimiser ou d'intervenir sur le cadre de vie des autres, et de s'approprier tout seul la notion d'intérêt général. Le "chez moi" et le "chez toi" n'a pas le même sens quand on intervient sur le second...Concilier des intérêts particuliers et un intérêt général demande, je crois, une approche beaucoup plus modeste et nuancée.

Ce n'est pas parce que l'on possède du pouvoir (politique, institutionnel, ou financier) que l'on détient la vérité ou même une complète légitimité (même pour les politiques) pour s'annexer la notion d'intérêt général. La preuve en est, dans les démocraties, qu'en cas de contestation c'est au juge d'en décider au final. Ce qui énerve beaucoup au niveau des associations (de défense?), c'est qu'elles sont mieux à même de saisir la justice que les simples particuliers, et qu'elle récupèrent ainsi une parcelle de pouvoir, très faible en fait, mais qui fait peur. Mais elles ne représentent qu'un modeste contrepouvoir dans la réalité. D'où la tentation de les décridibiliser.

D'un autre coté, prendre les associations, surtout lorsqu'elles sont sont bien installées ou connues, comme seuls interlocuteurs pour une concertation locale, relève aussi d'une facilité qui revient en fait à conserver une maîtrise sur les débats (d'où le fait qu'elles sont le plus souvent "noyautées" par des sympatisants).

Organiser des concertations plus larges, malgré la difficulté de mobiliser sur des sujets pas toujours faciles, est cependant toujours possible (réunions, large publicité, information sur les sites officiels, voire consultations sur internet), mais, dans la réalité, rarement fait. Il suffit de voir les annonces légales officielles dont on se contente le plus souvent pour les enquêtes publiques, noyées dans des pages d'avis administratifs, ou les affichages en mairie tout aussi difficiles à trouver (et encore, qui fréquente quotidiennement les mairies ?).

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#9 24-10-2006 10:15:05

NouvelAngevin
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Re: Concertation

le renard des volumes a écrit:

Pour définir l'intérêt général d'un projet, il faut prendre en compte les intérêts particuliers ou communautaires (et non les inclure dans le projet, nuance),

"prendre en compte" et "inclure" sont des mots aussi imprécis l'un que l'autre...

le renard des volumes a écrit:

en revanche il ne peut pas se conformer à un intérêt particulier (La Palisse n'aurait pas dit mieux D4 )

si, bien sûr : il suffit que les communautés soient d'accord entre elles

le renard des volumes a écrit:

Pour NIMBY (pour Not In My Back Yard : pas dans mon jardin), voir la définition (succincte) de Wikipedia :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Nimby
C'est un phénomène né aux USA au début des années 80, qui a fait couler beaucoup d'encre et servi de support à bien des études sociologiques depuis. Pas une vue de l'esprit, donc...

servir à des études socio ne suffit pas à forger la validité d'un concept !

le renard des volumes a écrit:

Des nimbies ne luttent pas contre un projet mais seulement contre sa localisation dans leur voisinage. Comme tu vois, la définition est très précise et ne permet pas d'assimiler tous les 'antis' à des nimbies.

c'est au contraire très flou ! Comme le dit très bien Venise, les "chez moi" et le "chez toi" ne sont pas des concepts précis, objectifs, mais d'une totale subjectivité (ce qui n'enlève rien à leur intérêt d'ailleurs) : si je reformule ce que tu dis, cela siginifie qu'un homme qui défend sont chez soi est un nimbi ? Alors je suis un nimbi, et je suis fier de l'être : défendre sa maison des agressions extérieures est un comportement aussi naturel que légitime, même si cette agression extérieure est vue par d'autre comme un progrès social allant dans le sens de l'intérêt collectif. Si j'ai fait référence au totalitarisme, ce n'est pas par mauvais esprit, c'est parce que la comparaison est pertinente d'un point de vue intellectuel : le totalitarisme naît avec l'appropriation par certains de la définition de l'intérêt général (ce que Venise formule très bien).
Le "plutôt dans le jardin du voisin que dans le mien" est évidemment criticable en soit, in abstracto, puisque dans l'absolu ce qu'on ne se souhaite pas à soi-même, il ne faut pas le souhaiter aux autres, mais ça peut être aussi l'expression d'une impuissance et d'un désespoir. Par exemple, une dame habite une maison depuis 30 ans, elle y a toute sa vie, c'est son "chez soi", et on lui annonce qu'on va faire passer le TGV sous ses fenêtres. Elle devient aussitôt nimbi et fonde son association avec un voisin. Elle dit : "je comprends que le TGV est indispensable, mais pas dans mon jardin s'il vous plaît". On n'est pas obligé de lui obéir (l'intérêt général passe avant l'intérêt particulier), mais on est paas obligé de la diaboliser. Et on a le droit de l'écouter. Et aussi de faire des efforts, si c'est possible, pour l'épargner.

le renard des volumes a écrit:

Les nimbies ne s'opposent pas au nom d'une autre conception du progrès, pour la sauvegarde de l'environnement ou du patrimoine (même s'ils peuvent récupérer ces thèmes pour faire avancer leur cause). Une association de nimbies travaille à des fins purement égoïstes.

L'égoisme n'est pas le diable et il est vain de l'opposer à la générosité. Si la dame citée plus haut ne se défend pas elle-même, égoistement, qui le fera à sa place. Nous allons tous mourir, non, et personne ne s'occupera de nous à la place de nous. Donc l'égoisme est légitime. Le problème ne se situe pas là. C'est pourquoi je dis que ce concept de nimbi n'est pas pertinent et qu'il fausse le débat.

le renard des volumes a écrit:

PS : pas la peine d'invoquer le totalitarisme (attention, on approche du point Godwin ! E1 )

Voir plus haut...

Dernière modification par Stickyesman (24-10-2006 12:43:04)

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#10 24-10-2006 12:41:10

Boris_F
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Re: Concertation

Quelque chose m'échappe franchement dans ce débat :

si je ne m'abuse, des élus sont élus par le peuple pour porter un projet, n'est-ce pas, c'est là le sens de la démocratie représentative : l'élu représente le peuple.
L'élu local porte un projet d'aménagement urbain lorsqu'il se présente aux élections municipales, par exemple, et les citoyens l'élisent pour qu'il porte ce projet jusqu'au bout. C'est à ce moment des élections que le choix est fait.

Dès lors, quel est le statut de la concertation dans cette optique ?

--> on peut aménager un projet de proximité pour le rendre plus conforme aux besoins des riverains ; exemple : l'aménagement d'une rue pour sécuriser les abords d'une école, au détriment des places de stationnement ;

--> on peut aménager un projet d'intérêt d'agglomération pour le rendre plus conforme à une fonction qui dépasse le simple confort des riverains tout en tenant compte tout de même de leur point de vue direct ; exemple : l'usine d'incinération est nécessaire à l'agglo, ce projet a été acté lors de l'élection du maire ; par contre, ce dernier peut entendre les associations riveraines quant aux odeurs, aux bruits des camions-bennes, aux fumées toxiques et quant à l'intégration paysagère : l'usine d'incinération reste toutefois fondamentale pour l'agglo qui ne peut se permettre d'être submergée par les ordures ménagères.

--> on peut aménager un projet d'intérêt régional pour le rendre plus conforme à une fonction qui dépasse les habitants de l'agglo, et encore plus des riverains. Pourtant il faut tenir compte des trois strates, ce qui rend  le projet d'autant plus complexe. Exemple : une autoroute urbaine doit passer dans un faisceau de 300 mètres prévu depuis 20 ans dans le POS de l'époque, et toujours prévu dans le SCOT actuel. A la charge du maire de ne plus délivrer de permis de construire sur ce faisceau, et d'exiger à l'Etat des aménagements phoniques et visuels. C'était à la charge de son prédécesseur que d'invalider le SCOT s'il ne voulait pas d'autoroute, mais on peut partir du principe que s'il a été élu par le peuple, c'est donc que le peuple savait qu'une autoroute serait programmée dans ce faisceau. Le maire actuel peut être élu pour s'opposer à cette autoroute, et je sais qu'il existe la possibilité de réviser le SCOT dans ce cas, et de réenclencher un processus d'études complémentaires. Ceci dit, notre maire peut tenir compte des riverains, mais puisque l'autoroute est programmée depuis 20 ans, soit ces riverains n'ont pas consulté les documents de programmation d'aménagement et sont donc fautifs de leur ignorance de la loi ; soit ces riverains sont plus anciens et c'est à la charge de la mairie de les exproprier et de les reloger ; soit la mairie est coupable d'avoir accepté des permis de construire dans le faisceau de 300 mètres depuis que celui-ci existe. Dans un cas comme dans l'autre, en 20 ans, il y a eu le temps d'aménager le projet d'autoroute pour le rendre indolore, je ne vois pas pourquoi une association ferait du lobbying pour en empêcher la construction : au nom de quoi ? D'autant que les projets d'intérêts national ou régional sont souvent programmés très longtemps à l'avance.

La notion d'intérêt général est, par essence, inappropriable par quelques uns. Les lois sont conçues pour que la définition d'un projet d'intérêt régional soit validé par le peuple, à travers ses représentants, dans la "déclaration d'utilité publique". Cette enquête est totalement formalisée, et est garante du respect de la loi et des habitants. Le concept d'intérêt général ne souffre donc, en droit français, d'aucune approximation.

Le nimbisme est souvent une fédération idéologique de riverains qui s'accordent à penser que la loi est mal conçue, et qu'elle sera de toute manière en leur détriment. Or, dans le système de démocratie représentative qui jusqu'à nouvel ordre est le seul qui soit constitutionnel, on impose à tout citoyen le respect de la même loi sur chaque point du territoire. C'est là la définition de l'unité de l'Etat, et donc de la République. Le nimbisme est donc du lobbying pur et simple, qui use souvent de chantage juridique - allant jusqu'à figer le SCOT de toute une agglomération par l'utilisation de recours suspensifs au tribunal administratif - pour défendre des intérêts propres au-delà de ce que prévoit la loi. Le nimbisme conteste la loi.

Il ne faut pas faire l'amalgame entre le nimbisme et les associations de proximité. L'institution peut organiser une consultation via des conseils de quartier, par exemple, associatifs mais surtout ouverts à tous. Mais l'institution doit garder à l'esprit qu'en tant qu'élue par le peuple, elle ne peut se plier aux caprices des uns et des autres simplement parce qu'elle porte un projet qu'elle doit mener au bout : c'est le sens de son élection représentative.

Le mythe de la démocratie participative est né du fantasme de l'autogestion. L'autogestion est la gestion d'un territoire par les administrés eux-mêmes, qui deviennent ainsi dialectiquement administrateurs, ce qui permet une totale décentralisation de la prise de décision. Ce système est issu d'une conception utopique de l'Etat et a été initié par Saint-Simon, Fourier, Proudhon et Owen au XIXème siècle, repris par les mouvements anarchistes. Il implique le nivellement total du clivage entre dirigés et dirigeants, une égalité de tous face à la décision, et une attitude collective supérieure dans la régulation des décisions. Cela signifie qu'un état de consensus préside nécessairement à tout aménagement. Les règles sont dressées par les personnes concernées par le projet, et la décision est donc extrêmement longue à prendre jusqu'au consensus. Par contre, elles sont acceptées par tous puisque définies par tous. Nous sommes donc là dans un univers saint-simonien incompatible avec une une démocratie représentative : on est dans une participation de chacun à l'avenir de tous, ce qui est le suc de la démocratie participative.

Or, cette dernière ne peut s'accomoder de la moindre représentation : les participants à un système d'autogestion doivent renoncer à vouloir décider pour les autres et, à l'inverse, doivent pouvoir faire connaître et valoir leurs droits dans ses structures appropriées. Cela signifie que l'élu du peuple n'a plus lieu d'être, ni la loi qui régit l'aménagement du territoire qui est au-dessus, par définition, des droits individuels auto-proclamés par consensus.

Il n'y a pas loin d'une démocratie participative intolérante, confisquée par quelques associations de proximité à la tendance nimby, au poujadisme de base qui consiste à refuser tout parlementarisme au profit d'une seule corporation. Il existe des risques de glissement vers le clientélisme ou la défense d'intérêts égoïstes dans un système qui prétend mettre le citoyen au même niveau de décision que l'élu.

Je pense qu'il y adeux niveaux de participation qui permettent d'éviter le délire nimby, tout en conciliant représentation et besoins de proximité, et un troisième qui est bien plus dangereux :

--> la consultation au niveau de l'étude du projet entre techniciens et services études permet de proposer différents scenarii aux citoyens, ces derniers pouvant opter pour celui qu'ils jugent le plus adapté à leur attente par exemple lors d'une simple enquête ou même lors d'un référendum local si celui-ci est conforme à la loi ;

--> la consultation sur un projet d'un échantillon de personnes ou d'acteurs choisis pour leur implication dans le projet ; cette consultation va mener à l'élaboration de différents scenarii présentés aux habitants, et les élus trancheront en connaissant tous les éléments ; cela demande une très solide coordination sur le terrain, de manière à ce que tous les citoyens concernés puissent s'exprimer, et non seulement quelques associations ; la communication est au coeur de ce processus consultatif ;

--> la co-décision dépasse le cadre de la concertation et est exigée par les nimbies : consultation des habitants, élaboration de scenarii, présentation des scenarii aux habitants, décision par délégation de compétances à un conseil de quartier par exemple formé au sein des habitants et qui se veut donc représentatif : c'est là où on est dans le paradoxe et dans le problème d'une possible confiscation de la décision par quelques uns qui servent leurs intérêts particuliers au détriment des autres.

N'oublions pas une chose : si l'institution se voit retirer une partie de son pouvoir par quelques-uns, dans une optique récriminative de cogestion ou de participation, elle perd sa légitimité à être élue par le peuple, ce qui met en danger la démocratie représentative, ou la démocratie tout cours au sens de la philosophie du droit... Le travail politique sur l'aménagement du territoire demande une vision globale et à long terme, qui doit composer avec les demandes sectorielles, mais sans perdre le sens global du projet d'aménagement pour lequel l'institution a été élue. Sinon, la société risque de devenir un morcellement de corporations exigeant la prise de décision, ce qui entraînerait au mieux une recherche paralysante d'un illusoire consensus, et au pire une guerre civile et territoriale remettant totalement en cause les acquis républicains F8


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#11 24-10-2006 19:11:09

NouvelAngevin
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Re: Concertation

Je crois que tout se passe dans une marge étroite entre le respect des principes clefs (la représentativité de l'élu et son droit à prendre des décisions légitimées par cette représentativité), sur lesquels il n'est pas question de revenir, et la gestion pragmatique des effets pervers de ces mêmes principes.

Il y a un classique de la sociologie intitulé "effets pervers et ordre social", de Raymond Boudon, qui insiste précisemment sur le fait qu'aucun système - si juste et affiné soit-il - n'échappe à ce phénomène des effets pervers, un concept que je trouve pour ma part extrêmement fécond.

- Les dérives du nimbisme = un effet pervers de la (nécessaire) prise en compte des intérêts individuels affectés par un projet collectif.

- la consultation populaire = une manière d'atténuer les effets pervers de le délégation démocratique d'un choix d'intérêt collectif dans les mains d'un élu, homme par essence faillible et imparfait.

D'un côté, un principe démocratique indépensable ("le plus mauvais des systèmes, à l'exception de tous les autres" disait Churchill), de l'autre la gestion des effets pervers de ce principe démocratique indépassable (l'élu utilise souvent mal son pouvoir, ne serait-ce que parce qu'il est difficile de bien l'utiliser).

Le nimbisme oscille de ce fait entre légitimité et illégitimité, selon la clairvoyance de ceux qui s'y adonnent.

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#12 24-10-2006 22:24:54

venise
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Re: Concertation

ohé MyNight c'est pas encore la guerre civile, et on ne remet pas en cause la république! la concertation est un progrès dans une démocratie républicaine. Tout est dans la façon dont on la mène et il y a encore beaucoup de progrès à faire. A cet égard pour les grandes infrastructures une Comission nationale du débat public amène des avancées (voir son site) ; les insuffisances des enquêtes publiques ont été relevées récemment dans un rapport de novembre 2005, en ligne sur le site de la Documentation française, et la législation devrait évoluer. Il y a bien un débat, qui reste malheureusement un peu confidentiel. Débat parcequ'il y a des enjeux, parce que en matière d'urbanisme et de protection de l'environnement ces enjeux sont complexes, les légitimités sont multiples, les arbitrages pas faciles, les sensibilités mobiles et évolutives.

Pour ce qui est des élus, même au niveau local, ils sont rarement choisis sur des projets. Il est donc faux de dire que leur élection légitime tous leurs choix.Si leur tâche n'est pas toujours facile, ils sont censés représenter tous leurs électeurs, et même ceux qui n'ont pas votés pour eux, ou pas voté du tout. donc prendre en compte tous les intérêts en présence. Et ils sont soumis aux lois, comme tout le monde, y compris aux lois qui organisent des concertations obligatoires, aux lois qui imposent des contraintes techniques ou des études d'impact, et qui permettent à tout un chacun y ayant un intérêt légitime de contester leurs décisions.

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#13 24-10-2006 23:20:47

NouvelAngevin
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Re: Concertation

Pour ce qui est de la concertation, je dois dire qu'il me semble qu'il y a là tout un potentiel de progrès démocratique encore largement sous-exploité. Je ne veux pas faire de politique car ce n'est pas le lieu, mais l'exemple du CPE me vient malgré moi en tête : cette façon de promulguer des lois de façon très verticale et autoritaire, sans aucune concertation, me semble profondément démodée, et l'on peut penser qu'elle est en bonne part responsable du rejet qui a suivi. Bien sûr, trop de concertation aboutit à la paralysie car chacun veut faire entendre sa voix, mais il me semble qu'il y a de la marge, et que la société dans son ensemble souffre plus d'un déficit de dialogue élus/électeurs que d'un excès...
En revanche, il faut apprendre à canaliser ce dialogue pour qu'il reste constructif. Des procédures existent, fondées par exemple sur l'analyse multicritères qui consiste à décomposer l'intérêt d'un projet donné en différents critères autonomes de façon à maintenir les gens dans une logique d'arbitrage rationnel entre plusieurs objectifs donnés. C'est peut-être un peu lourd, mais c'est très efficace. A la fin, c'est l'élu qui tranche, mais il fait sur une base plus rationnelle et plus concertée. Il s'agit en d'autres termes de rationaliser et de rendre plus transparente la prise de décision publique en faisant apparaître plus clairement sa nature d'arbitrage entre divers objectifs +/- compatibles. Vous voulez moins de bruit ? Alors il faut investir plus en murs anti-bruits, ce qui suppose qu'on payera des impôts plus élevés ou qu'on fera une école maternelle en moins, etc.

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#14 24-10-2006 23:27:25

Boris_F
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Re: Concertation

venise a écrit:

ohé MyNight c'est pas encore la guerre civile, et on ne remet pas en cause la république! la concertation est un progrès dans une démocratie républicaine. Tout est dans la façon dont on la mène et il y a encore beaucoup de progrès à faire.

Ohé, Venise, tu as lu en diagonale ce que je dis ou quoi ?...

Pour les élus soi-disant rarement élus sur des projets, de quelle planète tu sors ?... Ils sont élus sur quoi, sur leurs dents blanches, la couleur de leur cravate ?... Quant aux concertations obligatoires, je dis en long, en large et en travers que les élus le sont à travers la Constitution, sur des principes républicains, et donc sur des fondements légaux. Les contraintes techniques sont au fondement de tout projet. J'ai suffisamment fréquenté ces milieux professionnellement pour en être convaincu, crois-moi.

Mais...

[les élus sont]soumis aux lois, comme tout le monde, y compris aux lois qui organisent des concertations obligatoires, aux lois qui imposent des contraintes techniques ou des études d'impact, et qui permettent à tout un chacun y ayant un intérêt légitime de contester leurs décisions.

Ah bon ? Le citoyen a "un intérêt légitime de contester [les] décisions [des élus]" ?... Outre empêcher un projet d'aboutir par la recherche systématique de vices de forme, non, je ne vois pas, mais alors pas du tout ce que tu veux dire. Tu as les textes de lois sur lesquels tu te fondes ? Et jusqu'où va la légitimité du citoyen, jusqu'aux manches de pioche ?

Cf. la construction de la centrale nucléaire de Brétignolles/Mer qui a été annulée en 1976 suite à des émeutes qui ont failli faire des morts ; heureusement pour les Vendéens, cette centrale a été construite plus loin, à Gravelines, Le Blayais, Paluel, Flamanville, et Penly au choix... Ca, c'est du nimbisme pur et dur, et désolé de le dire, la violence comme seule source de dialogue est purement illégitime. Libre à toi de la trouver normale, et mieux encore, légitime... En tout cas, j'espère n'être pas celui qui un jour portera un projet d'intérêt général en représentant l'Etat à côté de ton jardin, ou alors je viendrai en gilet pare-balle, sait-on jamais...


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#15 24-10-2006 23:32:20

Boris_F
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Re: Concertation

@ NouvelAngevin

Oui, je suis d'accord avec toi, tu poses les principes d'une concertation comme je le disais plus haut :

--> la consultation sur un projet d'un échantillon de personnes ou d'acteurs choisis pour leur implication dans le projet ; cette consultation va mener à l'élaboration de différents scenarii présentés aux habitants, et les élus trancheront en connaissant tous les éléments ; cela demande une très solide coordination sur le terrain, de manière à ce que tous les citoyens concernés puissent s'exprimer, et non seulement quelques associations ; la communication est au coeur de ce processus consultatif ;

Je suis aussi pour ce mode de concertation, à partir du moment où elle intègre un calendrier strict et une prise de décision actée et ferme. C'est ainsi que les plus grands projets ont abouti en France pratiquement sans faillir.

(NB : je plaçais mon point de vue à l'échelon territorial exclusivement, le CPE ne me semble pas entrer dans ce type de principe qui a davantage lien avec la communication institutionnelle. C'est un tout autre débat, et je ne voudrais pas que ce thread aille dans cette voie car ce n'est pas l'objet du forum).


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#16 24-10-2006 23:34:58

NouvelAngevin
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Re: Concertation

MyNight a écrit:

(NB : je plaçais mon point de vue à l'échelon territorial exclusivement, le CPE ne me semble pas entrer dans ce type de principe qui a davantage lien avec la communication institutionnelle. C'est un tout autre débat, et je ne voudrais pas que ce thread aille dans cette voie car ce n'est pas l'objet du forum).

Sorry !...

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#17 25-10-2006 07:34:02

venise
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Re: Concertation

@ MyNight

Tout doux, c'est toi qui a conclu en premier sur une perspective de guerre civile et territoriale, et maintenant tu évoques le gilet paret-balle, alors que je ne te parlais que de LA LOI, qui prend en compte, dans certains cas, des intérêts légitimes à agir (c'est à dire, effectivement, à contester des décisions des élus comme de l'état). Celà s'appelle même, en droit administratif, le "recours pour excès de pouvoir". Et d'ailleurs notre droit, assez équilibré, prévoit aussi des amendes en cas de "recours abusif".

Personne n'est infaillible (même pas les experts), et on est toujours plus intelligent à plusieurs que tout seul ; multiplier les consultations et les avis est ce qui permet de dégager au mieux l'intérêt général ; c'est donc bien la voie à suivre, même si les projets en sont ralentis ; et celà n'a jamais empêché l'action. En revanche l'acceptation est bien meilleure.

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#18 25-10-2006 09:57:20

NouvelAngevin
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Re: Concertation

NouvelAngevin a écrit:

Je ne veux pas faire de politique car ce n'est pas le lieu, mais l'exemple du CPE me vient malgré moi en tête : cette façon de promulguer des lois de façon très verticale et autoritaire, sans aucune concertation, me semble profondément démodée.

J'aurais pu/dû prendre comme exemple les grands travaux mitterandiens à Paris : ce dont je voulais parler, ce n'est pas de la droite ni de la gauche, mais du "fait du prince" - c'est lui qui me semble profondément démodé.

Le "fait du prince", très vertical et hiérarchique, est adapté à une société qui est elle-même très verticale et hiérarchique, où l'on ne peut pas compter sur le peuple pour apporter ses lumières lors d'une consultation. Mais quand le niveau d'éducation général progresse, la capacité générale à comprendre les enjeux des grands projets progresse aussi, et cela justifie que la gouvernance s'éloigne peu à peu du "fait du prince" pour se rapprocher de la consultation (je ne dis pas y tomber, juste s'en approcher).

J'ai lu dans une discussion qu'à cause de la consultation sur les halles, Delanoe avait abanbonné l'audacieux projet Nouvel pour le plus conservateur projet Mangin, comme si la consultation était une force menant vers la médiocrité et le consensus mou : je crois que c'est injuste d'affirmer cela, car c'est toujours le politique qui possède la décision finale et Delanoe pouvait choisir Nouvel quand même. Encore fallait-il qu'il assume l'écart qui s'est révélé entre sa conception (il pensait que le projet Nouvel était meilleur) et celle du "peuple" parisien (qui a préféré le projet Mangin).

Cet écart qui peut exister entre ce que l'élu et le "peuple" estiment chacun être "le meilleur projet" me semble d'ailleurs très intéressant : il mesure l'idée que l'élu se fait lui-même de la "supériorité" de sa vision sur celle de la majorité. Parfois, aux yeux de l'histoire, cet écart finit par s'avérer réel (un élu éclairé dirige une masse idiote), parfois non (un élu mégalomaniaque dirige une masse impuissante et lucide).

Plus l'élu s'écarte de la volonté dominante exprimée par la consultation populaire, et plus il affirme ce qu'il croit lui-même être une "supériorité" de vision : il y a là, au choix, de l'audace, de la mégalomanie, de la bêtise, de la lucidité, de la grandeur ou de la petitesse...

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#19 25-10-2006 20:36:13

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Re: Concertation

le renard des volumes a écrit:

...Des nimbies ne luttent pas contre un projet mais seulement contre sa localisation dans leur voisinage. Comme tu vois, la définition est très précise et ne permet pas d'assimiler tous les 'antis' à des nimbies. Les nimbies ne s'opposent pas au nom d'une autre conception du progrès, pour la sauvegarde de l'environnement ou du patrimoine (même s'ils peuvent récupérer ces thèmes pour faire avancer leur cause). Une association de nimbies travaille à des fins purement égoïstes et l'intérêt qu'elle défend (pour simplifier : ok pour le projet mais pas chez moi) n'est pas compatible avec la recherche d'un consensus pour la définition d'un (forcément imparfait) intérêt général.

Alors là le renard des volumes, je suis ENTIEREMENT D'ACCORD AVEC TOI

Tu as tappé dans le mille!  C'est comme tous les pseudo-écolo qui veulent des énergiesrenouvelables et qui ne veulent pas d'éoliennes à côté de chez eux.

Mais je suis tout à fait convaincu que les décideurs ne sont pas duppes.
Exple d'un maire adjoint de Toulouse, concernant une emprise de 8 hectares dans Toulouse qui va se libérer d'ici 5 à 6 ans et dont les associations de quartier commencent à se positionner pour de futures concertations en annonçant qu'elles veulent que des petits collectifs, si ce n'est pas que des maisons!, de la verdure, des maisons de quartier ... ... ..., . Il leur a répondu que "le quartier appartient autant aux habitants de  celui-ci que de la ville dont il fait partie et que par là-même il devra dans sa conception répondre aux besoins autant des habitants du quartier que des habitants de la ville".

 

#20 26-10-2006 11:17:50

NouvelAngevin
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Re: Concertation

Lu ce matin (édito Ouest France en ligne, extraits)

Le Centre d’études de la vie politique française vient de publier les résultats d’une enquête d’opinion : Pour 60 % des sondés « les élus et dirigeants politiques sont plutôt corrompus ». La proportion est énorme mais elle n’augmente plus depuis qu’elle a fait un bond spectaculaire, dans les années 1980, avec la multiplication des « affaires ». (...).

LA CORRUPTION, PARTIE VISIBLE D'UN MAL PROFOND
Pour le philosophe Yves Michaud (...), ce jugement sévère est dû à l’état de « dé-moralisation » de la société française : « À partir du premier septennat du président Mitterrand nous avons vécu une perte de moralité : nous sommes allés de désillusions en désillusions qui ont ébranlé, l’une après l’autre, les croyances qui portent la vie démocratique […]
Pierre Rosanvallon, professeur au Collège de France, estime qu'une société démocratique (...) est génétiquement suspicieuse « pour maintenir l’exigence initiale d’un service du bien commun ». Or, dans notre monde qui a perdu confiance dans le progrès, où les politiques publiques sont impuissantes à domestiquer l’économie, où les individus se fient moins les uns aux autres parce qu’ils ne se connaissent plus assez, le doute originel produit une défiance généralisée qui, elle-même, organise une « contre-démocratie ». « Cette contre-démocratie n’est pas le contraire de la démocratie, explique le chercheur, c’est plutôt la forme de démocratie qui contrarie l’autre, la démocratie des pouvoirs indirects disséminés dans le corps social, la démocratie de la défiance organisée face à la démocratie de la légitimité électorale. »

Voir mes propos ci-dessus sur le nimbisme, nécessaire contre-pouvoir (j'anticipe la critique : "le nimbisme n'est pas le "pouvoirs indirects disséminés dans le corps social", ce sont des salops égoïstes et sectaires" - et je demande : comment établir la différence entre le nimbi égoïste et buté et le citoyen contestataire légimite ?

Ce face à face débouche sur le divorce entre citoyens et élus (...). On ne s’en remettra en « redessinant le cadre même de la démocratie. » Lutter contre la corruption politique ne suffira pas à guérir du mal mortel qui nous mine.
ISSUES DE SECOURS
Selon Pierre Rosanvallon, les « voies nouvelles de la démocratie » passeront d’abord par le développement des formes d’implication des citoyens dans les décisions qui les concernent » car il y a une demande générale de plus de concertation.
« Un pouvoir n’est maintenant perçu comme légitime que s’il se soumet régulièrement à une épreuve de discussion et de justification. L’utopie d’un État omniscient, capable de gouverner d’en haut la société de façon rationnelle, a perdu toute consistance. »

Voir mes propos plus haut sur le "fait du prince, profondément démodé"

Deuxième impératif : « Améliorer les mécanismes représentatifs » en jouant sur (...) le recours à des formes de démocratie directe et, plus globalement, la reconfiguration des différents pouvoirs.
Pour que la « contre-démocratie » ne tourne pas en populisme destructeur, il propose un niveau intermédiaire entre la représentation politique et le pouvoir informel de l’opinion.

Voir mes propos ci-dessus sur les procédure de choix multicritères.

On dirait qu'il a écrit l'article exprès  !... (désolé, je n'arrive pas à mettre en page correctement)

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#21 26-10-2006 22:31:33

Boris_F
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Re: Concertation

Voir mes propos ci-dessus sur le nimbisme, nécessaire contre-pouvoir (j'anticipe la critique : "le nimbisme n'est pas le "pouvoirs indirects disséminés dans le corps social", ce sont des salops égoïstes et sectaires" - et je demande : comment établir la différence entre le nimbi égoïste et buté et le citoyen contestataire légimite ?

C'est vrai que c'est parfois délicat, pas de doute ! Je crois que le tout se situe dans le respect de la loi, entre la légitimité et le llégalisme... Pas facile, dans certains cas, c'est clair...

J'ai fait une étude sur ce sujet et l'internet dans le cadre de mon taf il y a quelques années : si tu donnes au citoyen la possibilité de s'impliquer dans la vie citoyenne par de nouveaux outils (diffusion des conseils municipaux, vote par le net, forums associatifs, dialogue par chat avec les élus), cela n'implique que ceux qui se sentent déjà concernés dans le réel. Cela ne donne naissance à aucune nouvelle vocation, et c'est pourquoi un grand nombre de mairies n'ont pas poussé plus avant la 'télé-citoyenneté'. Le but était pourtant d'ouvrir le processus de décision en le rendant transparent en temps réel. Mais comme seuls se sentent concernés ceux qui le sont déjà, ceux qui pensent que le pouvoir est corrompu se tiennent à l'écart de ce genre de processus sein de communication et de participation. Ils restent donc persuadés que le système est pourri, et ne font aucun effort pour tenter de comprendre les process qu'ils dénigrent par a priori et méconnaissance.

Face à ces représentations, des légalistes - des nimbies qui attaquent la moindre procédure pour vice de forme - ont la plus grande facilité à surfer sur la vague de la suspicion, et pour imposer leurs idées avec une franche démagogie qui est renforcée par le fait qu'ils restent des maîtres dans les franges de la légalité. C'est fort américain comme manière de penser : là-bas, selon un système régi par le droit anglo-saxon, un particulier peut absolument tout contester si son avocat trouve le moindre vice de forme. Pour cela, un fumeur atteint d'un cancer du poumon peut attaquer les régies de tabac, une jeune conne son ancien amant pour viol, un parent le vétérinaire qui a vendu le chien qui a mordu le petit dernier, et ainsi de suite. L'arrière-pensée est de faire de l'argent, évidemment, mais sous couvert de la loi.
Je trouve qu'en France, on prend ce chemin, et pourtant il me semble qu'il est anti-citoyen que d'attaquer l'institution à outrance pour empêcher un projet qui de prime abord est pénible pour le confort individuel.

Dans le système de pensée français, l'esprit critique est issu de Descartes, porté et développé par les Lumières, donne lieu à la Révolution, au Droit Napoléon, et poursuit toute notre histoire jusqu'à maintenant. La suspicion est légitime quand elle recherche des failles qui entraînent une inégalité de quelques uns par rapport aux autres (attitude rousseauiste issue du Contrat Social). Mais quand elle est utilitarisée dans un but de profit personnel, elle devient anti-citoyenne. Le pouvoir indirect, disséminé, désincarné, peut être garant de la liberté et du respect du droit - si on juge que la conscience collective est au fondement de l'Etat. Mais là où il y a un tour de passe-passe, c'est quand des nimbies prétendent représenter le peuple, tels des chevaliers blancs, sous couvert d'un légalisme assumé et triomphant (baisons le système avec ses propres armes qui nous baisent) : ils ne représentent pas le peuple, mais seulement leurs propres intérêts ; leur communication est extrêmement bien huilée, et d'autant plus dangereuse. Comme je n'ai pas envie de me manger un procès, je ne citerai personne (ce n'est pas par lâcheté, mais ce n'est pas mon combat, surtout pas ici d'ailleurs), mais je connais quelques dossiers qui passent par la préfecture de police de Paris et qui sont extraordinaires... C'est fou comme le bon droit autoproclamé des uns peut nuire à beaucoup d'autres...

Bref, je pense que non seulement le nimbisme pur et dur surfe sur la vague du divorce entre élus et citoyens, mais plus encore, l'entretient et l'entraîne. Ce contre-pouvoir n'est pas réellement démocratique, malgré ses prétentions, car il est violent - au moins intellectuellement, sinon par la manipulation des franges du Droit - mais de plus, il exige une redéfinition du Droit. Redéfinir le Droit pour l'exigence de quelques uns, cela s'appelle le révisionnisme, un Etat à géométrie variable - ce qui était assumé dans certaines formes d'anarchisme au XIXe siècle -, et aussi le clientélisme. Finalement, avec des outils différents, il s'agit de faire ce que l'on reproche chez l'élu ennemi.

Je tiens à dire qu'un élu traficoteur est aussi un mal extrême pour le Contrat Social, je le mets exactement au même niveau que le nimbisme hard.

Ce qui m'ennuie le plus, c'est que la saine concertation est discréditée par ces deux extrêmes. Je rêve qu'un jour tout le monde est une conscience morale (pas moralisatrice, juste morale) de la chose publique, et je pense que c'est à l'Education Nationale de donner la culture suffisante pour cela à chaque citoyen. Et zut, encore mon côté idéaliste qui ressort...  A5


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#22 26-10-2006 23:48:35

Thierry
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Re: Concertation

Ceci ne répond pas directement aux différences questions, mais il y a un article très intéressant dans la revue Esprit de juillet, intitulé « Démocratie et participation : l'exemple de la rénovation urbaine ». Qui dit rénovation urbaine dit quartiers en difficulté : il s'agit d'opérations qui remettent en cause de manière importante un habitat dégradé et défavorisé (rien à voir avec le projet des Halles). L'intérêt de l'article est qu'il part de quatre exemples très concrets de concertation ou de non-concertation et les interprète à la lumière des théories et des pratiques anglo-saxonnes, qui permettent une participation beaucoup plus effective des citoyens.

Il reprend une « échelle de la participation » élaborée dans les années 60 par Sherry Arnstein, qui distingue trois grands niveaux de participation des citoyens aux projets de rénovation urbaine :

- non-participation : le pouvoir se contente d'informer vaguement les habitants et gère leurs relations par la publicité ou les relations publiques, en évitant de leur présenter les vrais enjeux. Les deux exemples choisis : les Bosquets à Montfermeil et le quartier Wilson à Reims. Les auteurs soulignent le rôle de l'ANRU. En exigeant des dossiers bien ficelés aux collectivités locales, l'ANRU ne favorise pas la participation des habitants : avant la conclusion de la convention avec l'ANRU, les élus craignent de communiquer sur des projets qu'ils ne pourront peut-être pas tenir ; après, c'est un peu tard... D'où des stratégies de communication du type "Gestion urbaine de proximité" : il y a des passages assez drôles sur les journaux de quartier ou les "Maisons des services publics", où on ne présente que des aspects anecdotiques ou illisibles du projet.

- le niveau de la coopération symbolique : le pouvoir informe correctement les habitants et les fait participer à des réunions de consultation. Toutefois il conserve le contrôle des décisions et l'influence des citoyens n'est souvent que marginale. Deux exemples : Nantes (Malakoff - Pré Gauchet) et Dijon. Ils donnent l'exemple d'un maire qui, contre l'avis des architectes et urbanistes, accepte la demande des habitants de renoncer à la construction d'un gymnase : le maire se donne ainsi l'image d'un homme proche des préoccupations des citoyens alors qu'il ne cède que sur un point mineur du projet d'aménagement.

- le troisième niveau es celui du pouvoir effectif des citoyens. Ils disposent d'un pouvoir réel de codécision avec le pouvoir central. Il n'y a pas d'exemple en France (sinon par le biais de référendums locaux, mais là on n'est plus dans la démocratie participative mais dans la démocratie directe). Les auteurs donnent plusieurs exemples dans les pays anglo-saxons, par exemple aux Etats-Unis où le président Carter a confié aux habitants des ghettos la rénovation de leurs quartiers.

D'où l'interrogation : si cela marche là-bas, pourquoi pas en France ?

Il y a bien sûr des différences fondamentales entre les Etats-Unis, pays fédéral dans lequel, dès les origines, les citoyens ont toujours pris la peine de s'investir dans des associations locales responsables (qui faisaient l'admiration de Tocqueville), et la France où nous attendons beaucoup du pouvoir central, censé savoir déterminer l'intérêt général. Toutefois les auteurs donne aussi des exemples de participation effective en Angleterre, pays très centralisé.

Au-delà, les auteurs essaient d'opposer la « démocratie participative » telle que la rêvent les Français (où il s'agirait de donner aux citoyens un poids égal à celui des pouvoirs publics, comme dans le mythe de l'autogestion des années 70, ce qui est irréaliste), et la « participation démocratique »  à l'anglo-saxonne, où les pouvoirs publics, détenteurs des moyens financiers, cherchent à assurer le bien commun par le dialogue et la négociation avec les parties concernées (les habitants) dans des structures qui forcent chaque partie à être responsable.

Voilà, c'est un résumé rapide de cet article qui fait une trentaine de pages...

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#23 27-10-2006 00:24:46

Boris_F
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Re: Concertation

Merci Thierry, vraiment très intéressantes comme approches !

Je pense qu'il y a là deux types de civilisations très différentes dans leurs mentalités respectives. Les anglo-saxons sont beaucoup plus civiques et citoyens que nous, dans le sens où en France, nous sommes dans une appréhension en même temps excessivement conceptuelle de l'Etat, qui est palliée par une forte représentation antrhopomorphique (la 'Mère-Patrie', la Marianne, la Semeuse, la Liberté de Delacroix, etc.). Aux USA, l'Etat est l'affaire de tous, le peuple est le constructeur historique et pionnier du pays, l'individu est une véritable mise en abyme de la fédération. En France, l'Etat est un concept paternalisant (ou même 'maternalisant' vu les symboles de la République). Cela entraîne sans doute une définition de la citoyenneté très différente dans ces deux modes istitutionnels. Aux USA, la propriété individuelle est sacrée, en France l'action collective l'est beaucoup plus - ce qui nous ramène à la Révolution.

Je remarque toutefois que les outrances de la citoyenneté engagée à l'anglo-saxonne ont donné naissance aux nimbies... En France, ces outrances ont plutôt donné naissance aux mouvements associatifs d'extrême-gauche (ou extrême-droite parfois, extrêmes en tout cas.). Vaste débat...

Je ne me sens pas le courage ce soir d'approfondir, mais je suis persuadé qu'il y a un lien fort entre les deux conceptions que tu dépeints de la concertation et la représentation populaire qu'on peut se faire de la citoyenneté. Finalement, le Droit et l'Etat, ce sont deux notions éminemment culturelles, mine de rien, et je reviens donc à l'idée sous-jacente que c'est à l'Education Nationale en France de former les citoyens non en obligeant les élèves à souscrire à un mode de pensée mais en leur offrant une culture de la chose et l'esprit critique qui va avec. Il ne s'agit pas d'un processus d'acculturation, mais juste d'éducation civique...

Je suis toujours aussi idéaliste que tout à l'heure, désolé...  D6  A5


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#24 27-10-2006 10:33:58

NouvelAngevin
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Re: Concertation

Oui, très intéressant post de Thierry.

Je pense que lorsqu'on pose les choses comme cela, on sort de l'idéologie et on tombe vite d'accord sur l'évidence : si une participation constructive des citoyens à la prise de décision est possible, elle est souhaitable.

Par rapport à ce que disait MyNight sur l'essais infructueux de faire participer les citoyens via Internet, il est dommage que l'essais se soit arrrêté, car il faut du temps pour que ce genre de chose s'installe dans les moeurs. J'ai vu récemment sur le site du Parisien qu'un nouveau concept de site apparaît, le "site de voisinage". On y échange des idées, des tuyaux, des infos, on se garde son chat et on se prête sa perceuse. Bref, c'est un nouveau type d'espace public, et même d'agora puisqu'il y a des forums où ça discute des travaux d'aménagement du quartier. Naturellement, ce genre de site est appelé A LA FOIS à générer 1) plus de concertation démocratique constructive 2) plus de "nimbisme". Car on ne peut pas avoir l'un sans l'autre, le second étant un effet pervers du premier (cf Raymond Boudon).

Et je voudrais attirer votre attention sur un point : vous êtes tous des amoureux de tours. Les deux qui ont réagi àvotre anti-nimbisme, ce sont venise et moi. J'ai vu en regardant ses post (l'intuition...) qu'elle est aussi réfractaire aux tours que moi. J'y vois plus qu'une coincidence. Car la tour, qu'on le veuille ou non, est une architecture agressive, au sens où l'on ne peut pas ignorer une tour : elle se voit, et elle s'impose dans le paysage. Je sais que certains adorent la tour montparnasse, mais moi par exemple je la déteste. Pourtant, nous ne sommes pas égaux, lui et moi, face à elle : il voit sa tour de partout et moi je ne peux pas y échapper.

Si, comme vous, on aime une architecture aussi "agressive" (au sens défini plus haut), alors il faut aussi comprendre et accepter qu'on rencontre une certaine opposition au moment de l'imposer à ceux qui ne l'aiment pas. Que cette opposition vous frustre, je le comprends très bien. Si j'étais architecte amoureux des tours, je serais moi aussi frustré et, probablement, irrité par les associations de quartier qui se battent pour qu'on ne leur construise pas une tout à côté de chez eux. Mais quand on prétend influencer aussi fort la vie des gens, il faut accepter, plus qu'un autre, d'être soumis à leur critique.

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#25 27-10-2006 13:08:29

Thierry
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Re: Concertation

Pour ceux qui trouvent intéressante l'étude des niveaux de participation des citoyens que je mentionnais, l'article original de Sherry Arnstein est disponible sur le Web. Il date de 1969 et concerne d'abord les Etats-Unis, mais je crois que les catégories qu'il définit restent utiles :

http://lithgow-schmidt.dk/sherry-arnste … pation.pdf (13 pages)

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