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Vos livres préférés

 
#1
14-02-2007 20:21
Tonio del barrio
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EN ATTENDANT LE VOTE DES BETES SAUVAGES

Roman de l'écrivain ivoirien Ahmadou Kourouma, Paris, Seuil, 1998

Le troisième volet de la grande fresque ouverte par Les Soleils des Indépendances et poursuivie par Monné, outrages et défis montre que la compréhension des soubresauts politiques et sociaux dans l'Afrique de ces dernières années n'est pas réductible à ces discours convenus qui ont occulté la réalité. Après l'érosion puis l'effondrement de l'Autorité ancienne, après la difficile articulation entre le pouvoir traditionnel et la modernité coloniale, Kourouma dénude les fondations modernes de l'autorité du chef. Epopée d'un chasseur devenu dictateur par la force mais aussi la subtilité, En Attendant le Vote des bêtes sauvages est d'abord un roman de la parole.

L'HISTOIRE
En effet, pendant six veillées successives, un austère griot des chasseurs et son double bouffonnant racontent la geste purificatoire du dictateur Koyaga, son donsomana. En rompant le tabou de la nudité pour pouvoir afficher les décorations obtenues à Verdun, dans les tranchées, le père de Koyaga a ouvert une brêche dans la culture des Hommes nus, désignés par les ethno-colonisateurs comme des Paléonigritiques, et donc rendu possible leur exploitation par les Français. A la mort de son père, enfermé dans un cachot pour avoir conduit les Hommes nus dans leurs luttes contre la colonisation, Koyaga est envoyé à l'école. Dès cet instant, le futur dictateur va tenter de réunir en lui le double courant de la tradition et de la modernité colonisatrice. Ses dispositions belliqueuses le font envoyer dans l'armée. Il se couvre de gloire en Indochine, puis en Algérie, avant de rentrer définitivement dans la République du Golfe, devenue indépendante. Sur lui veillent sa mère Nadjouma ainsi que le marabout Bokano. Aidé tous les deux d'un Coran ancien et d'une météorite, objets qui confèrent à leurs propriétaire une puissance sans borne, ils initient Koyaga aux protections magiques. Chasseur aux pouvoirs étendus, il élimine des bêtes féroces qui hantent la région des Hommes nus, en les tuant et en empêchant leur retour : il leur coupe la queue ou les émascule puis enfonce la partie tranchée dans la gueule du monstre, condamnant les forces maléfiques à tourner en rond dans les restes de la bête. Il en sera désormais de même pour tous les opposants qui se dresseront devant lui. Mais l'intronisation du dictateur Koyaga ne sera définitive qu'après une tournée initiatique auprès des autres dictateurs des états d'Afrique de l'ouest. Il acquiert grâce à eux la conscience de se déterminer pour le camp libéral, dans cette Afrique de la guerre froide. Reconnu par ses pairs, protégé par sa mère et le marabout, Koyaga exerce le pouvoir. Il s'appuie sur la force, la magie, le parti unique, les faux complots dont il réchappe à chaque fois. Les richesses s'accumulent, pour ses proches et pour lui, jusqu'au moment où l'histoire le rejoint : brusquement déséquilibré par la fin de la guerre froide, le système de la dictature et du parti unique s'effondre, ruiné par ses dépenses somptueuses, ruiné aussi par la résistance active des jeunes scolarisés et désormais voués au chômage. Une dernière fois, Koyaga tente de retourner la situation et fait croire à sa disparition. Mais il est trop tard : lorsqu'il réapparaît, c'est dans un paysage désolé, ruiné par les soulèvements. Nadjouma et Bokano ont disparu, le Coran et la météorite avec eux. Ce n'est que grâce à un donsomana que Koyaga parviendra, peut-être, à les retrouver. Il retrouvera le pouvoir, aidé en cela par le suffrage uiversel, notamment celui des bêtes sauvages.

UN TEXTE CIRCULAIRE
Le roman de la parole mise en scène enferme Koyaga dans son histoire. Amputé lui aussi de ses attributs protecteurs, le dictateur tourne en rond dans la geste de ses actions. La mécanique mise en branle avec le geste initial du père ne parvient plus à être enrayée : elle aboutit à ce que la lutte pour garder le pouvoir devienne permanente, sanguinaire et conjuratoire. L'écriture même du roman inscrit en elle cette spirale, dont l'origine contient aussi la fin : par les effets de contrepoints, par les rimes narratives, par le jeu des proverbes dans les titres et dans le texte, le roman suscite ce jeu circulaire de renvois entre un commencement et une clôture. Plus que le dévoilement des parts d'ombre et de sang, communes à toutes les dictatures -le lecteur reconnaît aisément les tyrans représentés-, c'est le caractère désenchanté de ce cercle qui frappe dans le roman de Kourouma. Si dans Monné, outrages et défis le personnage principal était le peuple de Soba, parfois origine du récit, mais aussi parfois destinataire de l'épopée, dans En attendant le Vote des bêtes sauvages, le dispositif narratif est particulièrement troublant pour le lecteur : le donsomana est adressé par le griot Bingo directement à Koyaga, présent à l'exercice. Il est le réel destinataire de la geste, certes, mais par le jeu de l'énonciation, le lecteur semble lui aussi présent à la veillée, participant de cette purification. Ainsi, malgré le désenchantement, la verve de Kourouma prend naturellement en charge de multiples aspects de l'oralité, sortant la vision de l'Histoire du manichéisme le plus courant, un manichéisme appuyé par la critique désormais classique de l'ethnocentrisme. À l'inverse, le roman mêle avec une rigueur empreinte de jubilation, une profonde élégance de la forme, une singulière distinction de la langue, une rigoureuse intelligence de la part de chacun dans le désastre continu. Dans cette épopée du temps des partis uniques, Kourouma fait entendre avec une autre musique, la critique des impostures et des dangers de la complaisance. Aucune partie ne sort épargnée de son ironie mordante. Mais aucune partie n'en sort non plus complètement dégradée, comme reléguée dans un de ces obscur cachots où l'on enferme ceux que l'on ne veut plus voir ni entendre. Gageons, au contraire, que les échos répercutés depuis ce livre étonnant résonnent longtemps, et de plus en plus en plus fort.

Et je me souviens que j'avais bien aimé Vol de nuit d'Antoine de Saint-Exupéry


Visitez la partie de forum sur les villes d'Amérique latine :
- Santiago de Chile : http://www.paris-skyscrapers.fr/forum/v … 35&p=2
- Mexico City : http://www.paris-skyscrapers.fr/forum/v … 34&p=2
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Dernière modification par Tonio del barrio: 14-02-2007 20:22
#2
14-02-2007 21:02
Sinha
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bonne idée Tonio
pour moi trois auteurs majeurs
AMin Maalouf "Le périple de Baldassare" "les jardins de lumières" pour ceux qui aiment l' Histoire de l'orient et ses vicissitudes
Amadou Hampaté Ba "l'étrange destin de Wangrin " je préfère une citation de l' auteur:« Je suis un diplômé de la grande université de la Parole enseignée à l’ombre des baobabs. »
Hanna Arendt "la condition de l'homme moderne"complexe mais tellement instructif sur notre société contemporaine et les différences qui éxistent entre sphère privée et publique  .Mais   cela traite surtout  de  la relation de l'homme avec son univers technologique et les transformations que cela entraine  .

et dans un aure style
DE gianni Gianseti "Afrique mystérieuse,les peuples oubliés de la vallée de l'Omo" photos magnifique et récit de l'expedition dans la région.

Dernière modification par Sinha: 14-02-2007 21:18
#3
14-02-2007 21:02
Piéton
Modérateur
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du même auteur (ahmadou kourouma) il y a "allah n'est pas obligé", un roman narré par un enfant soldat de 12ans d'afrqiue occidentale, très bon livre...

mais mes préférés sont "le temps" et "les tactiques de chronos", tous les deux du même auteur, Etienne Klein, ce sont des essais sur ce que représente la notion du temps selon deux approches, une philosophique l'autre scientifique (etienne klein est un physicien français), ces deux livres ont le même thème mais ont été écrit à dix ans d'intervalle (1995-2005)...

#4
14-02-2007 21:04
Sinha
Ancien modérateur
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décidement  A10

#5
14-02-2007 21:06
Piéton
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(à 1 seconde d'intervalle A10 )

#6
14-02-2007 22:40
ed-redon
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Vous etes jumeaux?   A10
je n'ai lu-pour le moment- de Ahmadou Kourouma que 'Quand on refuse on dit non' de Ahmadou Kourouma,la 'suite' de Allah n'est pas obligé' et j'ai trop hate de lire ses précédents livres.

#7
15-02-2007 09:01
Tonio del barrio
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"Allah n'est pas obligé" est bien, je l'ai lu  mais je préfère le style et l'intelligence de "En attendant le vote des bêtes sauvages"


Visitez la partie de forum sur les villes d'Amérique latine :
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#8
15-02-2007 09:06
ed-redon
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merci du conseil, mais je crois que je vais tous les prendre et les dévorer! ;-)

#9
15-02-2007 09:07
Tonio del barrio
Moderador
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UN TRAIN DE GLACE ET DE FEU

par Ramon Chao
(le père de Manu Chao)


Dans un train fait de bric et de broc, une centaine de saltimbanques français et colombiens se proposent de réhabiliter les trains de passagers, pratiquement
inexistants dans ce pays. La Mano Negra, mais aussi French Lover's, les musiciens brésiliens Garrincha et Sorriso, des trapézistes, des anciens du Royal De Luxe, et un dragon cracheur de feu, offriront des spectacles gratuits dans les gares, provoquant l'émerveillement de dizaines de milliers de personnes. Chroniqueur de cette aventure, Ramón Chao a consigné, jour après jour, les péripéties de sept étapes, mille kilomètres de Santa Marta, sur la côte Caraïbe, à Bogotá : promiscuité, déraillements, séances de tatouages, maladies, accueil chaleureux dans les villages, séjour magique à Aracataca - le Macondo de Cent Ans de solitude -, réactions après la mort d'Escobar

Le réseau de chemins de fer de Colombie a été démantelé par l’action conjointe du lobby des camionneurs et le laxisme des gouvernements successifs. Une centaine d’artistes français et colombiens, parmi lesquels le groupe de rock Mano Negra, ont décidé de réhabiliter l’usage du train dans ce pays et ont pris l’initiative de rouvrir la ligne Bogota-Santa-Marta. Ce livre est le récit de ce voyage. Roulant à quinze à l’heure, déraillant au moindre virage, ils parcourent en un mois et demi la « ligne des Conquistadors » de 1000 kilomètres. Sans la moindre protection armée, ce Train de glace et de feu franchit les zones les plus chaudes d’un pays réputé le plus dangereux du monde (25 000 victimes de la violence l’an dernier). Ramon Chao a consigné, jour après jour, les péripéties de cette odyssée. Il en tire un vrai roman d’aventures. Mais en incorporant dans son récit des textes historiques, économiques, politiques, voire anthropologiques, son livre devient un traité sur la Colombie, vue de ses profondeurs.


Visitez la partie de forum sur les villes d'Amérique latine :
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#10
10-03-2007 17:47
A
archimonde
The Link
A
Date d'inscription: 22-09-2006
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D'un Montmartre l'autre

Le beau livre "Montmartre l'autre" est l'aboutissement d'un rêve, celui de Dominique Chauvat, journaliste et photographe montmartroise depuis 30 ans, et de sa "bande". A travers 3 000 cartes postales, photographies, dessins et peintures, cette équipe de passionnés vous livrent les clés de leur quartier.

Personellement je n'ai pas lu encore le livre (ou plutôt vu parcequ'il contient pleins de photos), mais j'aimerais vous donner le lien qui en parle.
http://www.linternaute.com/paris/magazi … utre.shtml
avec 42 photos l'une plus belle que l'autre.

#11
12-02-2010 18:52
Jack Uzi
Notre-Dame de Paris
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Peut être "1984" de Georges Orwell. Très bon exemple de "vivre ensemble" et d'urbanisme à ne pas suivre. En ces temps de "télé-réalité" on parle souvent du "big brother" de ce livre mais le thème principal y est sûrement le langage avec l'imposition du "novlangue" (langue volontairement appauvrie). En effet, le langage ne nous sert pas seulement à nous exprimer mais également à penser (on pense avec des mots non?). Chaque mot est un concept et le langage permet de jongler avec ces concepts. Le comble est de constater que les participants des "secret story" et autres "ferme célébrités" utilisent eux même une sorte de "novlangue". Enfin voilà, avec le développement des caméras de surveillance dans nos villes, des messages SMS, des fautes de français sur les forums internet - PSS excepté - A10 (non, c'est pas vrai), le développement de la "télé réalité"... je trouve ce livre d'anticipation de 1948 très visionnaire.

#12
21-10-2014 17:48
jaimeleraï
Exclu
Date d'inscription: 29-08-2014
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je ne sais pas trop, mais je vous signale que j'en ai écrit un, je le dis non pour frimer ou m'en vanter,  comme ça c'est tout, prouver que je ne suis pas qu'un emmerdeur ou provocateur, j'estime également avoir un cerveau.
mais je crois qu'on n'a pas le droit de faire de la pub sur PSS....alors j'abrège.
E9

Dernière modification par jaimeleraï: 21-10-2014 17:49
#13
21-10-2014 17:50
jaimeleraï
Exclu
Date d'inscription: 29-08-2014
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Jack Uzi a écrit:

Peut être "1984" de Georges Orwell. Très bon exemple de "vivre ensemble" et d'urbanisme à ne pas suivre. En ces temps de "télé-réalité" on parle souvent du "big brother" de ce livre mais le thème principal y est sûrement le langage avec l'imposition du "novlangue" (langue volontairement appauvrie). En effet, le langage ne nous sert pas seulement à nous exprimer mais également à penser (on pense avec des mots non?). Chaque mot est un concept et le langage permet de jongler avec ces concepts. Le comble est de constater que les participants des "secret story" et autres "ferme célébrités" utilisent eux même une sorte de "novlangue". Enfin voilà, avec le développement des caméras de surveillance dans nos villes, des messages SMS, des fautes de français sur les forums internet - PSS excepté - A10 (non, c'est pas vrai), le développement de la "télé réalité"... je trouve ce livre d'anticipation de 1948 très visionnaire.

1984 n'est plus de la science-fiction c'est la réalité quotidienne.

 

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