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Vision
347,00 m
"Une ville, depuis le matin jusqu'au soir, et encore du soir jusqu'à l'aube, cela vit, cela grouille, cela traverse une série d'activités, avec des baisses ou des hausses continues de tension. Les gens marchent, prennent le métro, le train, leur voiture, consomment du gaz, de l'électricité, regardent la télévision, travaillent, mangent, s'équipent, circulent. Il pleut, il y a du soleil. La Bourse monte, descend. Les agences de presse font crépiter les téléscripteurs. Et tout ce potentiel quotidien d'énergies, qui constitue la fièvre variable de la cité, n'avait jusqu'ici été capté par aucun instrument.
[...]
Ma tour sera le tensiomètre, le baromètre, le thermomètre, l'oscillomètre, l'enregistreur permanent du pouls de la ville. Grâce à des circuits de téléscripteurs et d'ordinateurs, nous recevrons jour et nuit dans le socle de la tour et sur les six plates-formes toutes les données utiles, celles qui concernent le mouvement des corps (solides, liquides, gazeux), et celles qui relèvent de l'information. Nous pourrons capter des signaux venant des administrations locales (comme la Préfecture, les P et T, la SNCF, la RATP, l'AFP, l'Aéroport de Paris, l'Office météorologique, la Bourse, l'Observatoire, etc), mais aussi des administrations régionales, nationales, voire de l'Europe entière. Grâce à cette sorte de contrôle permanent des fonctions, nous déterminerons à chaque moment le degré absolu d'excitation (une sorte de résultante) soit à Paris, soit en France, soit en Europe."1
Voilà comment Nicolas Schöffer, grand artiste Moderne d'origine hongroise et inventeur du Spatiodynamisme2, présentait son projet qu'il couvait pour Paris depuis 1963 : une tour cybernétique, comme il en érigea aussi à Liège (Belgique) en 19613, puis plus tard à Kalocsa (Hongrie) en 1982. Censé refléter la pulsation de la Megalopolis parisienne par divers procédés lumineux, ce gigantesque échafaudage (composé de tubes d'acier de section carrée de 2 m x 2 m encastrés dans des socles en béton) devait s'arrimer à la couche calcaire située à 15 m de profondeur, s'élever de 324 à 347 m de hauteur (selon les versions) et être visible à 30 km à la ronde.
Le projet fut tout d'abord soumis à André Malraux, alors Ministre de la Culture. Viable techniquement et économiquement - l'idée fut portée financièrement pendant plusieurs années par la société Philips qui y voyait un formidable outil de promotion -, le projet fut ballotté de ministères en ministères. Paradoxalement c'est alors que les fondations étaient déjà coulées que la mort de son principal soutien politique, Georges Pompidou, priva la tour de son principal appui. Un temps repoussée à 1990, elle fut finalement abandonnée.
Par la suite d'autres projets de tours cybernétiques4 furent envisagés, notamment pour le Liberty Parc du New Jersey (1986), puis en 2002 à la municipalité de New-York après les attentats du 11 septembre 20015.
Projet typique de l'utopie futuriste des artistes du cœur du XXe siècle, sa poésie en phase avec la frénésie des Trente Glorieuses n'a finalement pas vu le jour comme un certain nombre de projets similaires à la Défense6, et ce malgré un engouement pour le projet dans les médias nationaux7 et internationaux.
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