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Île-de-France - Analyse urbaine des émeutes

 
#1
08-11-2005 18:32
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Boris_F
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Sur ce forum, ce sujet brûlant n'a pas encore été abordé. Ce n'est pas il est vrai de son objet que de rentrer dans ce débat d’un point de vue politicien. Cependant, comme la problématique de la ville paraît être au coeur du débat, il me semble que finalement ce serait dommage de ne pas en parler, du moins d’un point de vue territorial.

Je peux vous livrer mon sentiment sur le sujet.

Quand on repense à l’histoire de la Ville en France, on voit qu’on est à la conjonction de deux phénomènes distincts : l’un est institutionnel, et touche de près la conformation de la strate communale et de tout ce que cela entraîne du point de vue du relais de l’Etat – de ses lois, des droits et des devoirs du citoyen - dans la quotidienneté de chacun.
L’autre est lié à la ville dans son sens urbain, à l’aménagement du territoire. On ne reviendra pas sur les besoins nécessaires de logement de l’après-guerre. Les ‘banlieues’ qui sont aujourd’hui mises en cause ont une longue histoire urbaine, liée aux diverses pressions démographiques et issues de l’immigration.  A l’après-guerre, je rappelle que la plupart des logements des centres-villes ne possédait pas toujours l’eau courante, peu le gaz, encore moins l’électricité, jouissaient de WC collectifs, et utilisaient du chauffage au bois. Lorsqu’on a construit des HLM, à l’immédiat après-guerre, il fallait résorber une crise du logement sans précédent. Non seulement il s’agissait de reloger les gens dans certains centres détruits, mais de plus, la reconstruction offrait l’opportunité de revoir les normes. Une HLM était équipée de l’eau, du gaz, de l’électricité, du chauffage central, de vides ordures, d’une isolation thermique sans comparaison possible avec les ‘vieux’ logements, et l’urbanisme tenait toujours compte de l’ensoleillement. De plus, l’invention de la dalle était conçue comme étant la réhabilitation du forum à la romaine, un lieu de rencontre et de partage.

Le gigantisme était dû à l’urgence du relogement, et il n’était pas prévu que cela entraînerait la dilution de l’individu. Le gigantisme était au contraire une manière de centraliser les services, les supérettes étaient plein essor, les parkings montraient que chacun pouvait avoir désormais l’opportunité d’avoir une voiture (dans les années 60), les écoles, crèches, dispensaires sociaux poussaient comme des champignons, et les MJC de Malraux fleurissaient un peu partout. Les cités d’urgence (comme les cités Phoenix, par exemple) étaient conçues comme étant du provisoire, et étaient censées juguler les nombreux bidonvilles qui existaient un peu partout autour des centres urbains. Se voir attribuer une HLM était donc bel et bien non seulement un signe d’intégration sociale, n’en déplaise à certains, mais de plus, c’était même parfois une véritable promotion, surtout pour les familles nombreuses…

Comment en est-on arrivé à la situation actuelle, et la ville – au sens urbain – est-elle la principale responsable de cet état de fait, par rapport à la Ville – au sens institutionnel ?...

Le modèle urbain à la Française a semblé souffrir certes d’un effet de suture relativement inexistante. Suture urbaine, certes, avec la parcellisation de la ville non plus en quartiers et faubourgs, comme avant-guerre, mais en îlots. Mais aussi de suture institutionnelle : en France, l’institution ne fonctionne pas à l’échelon territorial, car on part du principe que l’institution est relayée à n’importe quel point du territoire. Chaque citoyen est censé posséder le même niveau de services, d’équipements, de droits et de devoirs en tout lieu. C’est là ce qui fait son identité au peuple Français. Chacun a les mêmes droits à l’éducation, à l’accès aux systèmes de soins, aux aides sociales, etc. mais a aussi les mêmes devoirs quant à l’impôt, au service militaire (à l’époque), etc. Dans cette optique, je pense qu’il est apparu que le problème du parcellaire était secondaire, puisque quelque notion que l’on ait de la ville, que l’on habite dans un centre, une périphérie ou une banlieue, l’institution était la même pour tous.

Le problème réside dans l’écart qui a pu se creuser entre les deux. Finalement, le milieu urbain a-t-il généré en premier lieu un certain niveau d’exclusion institutionnelle, ou est-ce qu’à l’inverse une certaine fracture institutionnelle a pu favoriser de l’exclusion urbaine ?

Y a-t-il eu un transfert de certaines classes sociales qui a fait que des flux internes à la ville ont tendu à remplacer les classes moyennes des banlieues par des classes défavorisées ? Peut-on penser qu’un effet d’îlotage s’est renforcé par les flux migratoires qui ont changé la donne d’un point de vue économique, la pauvreté se substituant à un niveau de vie moyen ? On pourrait le penser, puisque de nos jours certains prônent la mixité sociale comme remède dans ces quartiers. Cependant, je ne crois pas que les choses soient si simples. Le principe des zones franches va dans le même sens.

A une échelle territoriale, comment peut-on penser qu’un quartier puisse être un îlot isolé, alors qu’il est intégré dans un tissu urbain dense et continu ? Car après tout, si on y réfléchit, les banlieues ont toujours eu des spécialisations fonctionnelles, même bien avant la deuxième guerre. En France, les banlieues sont d’anciens villages, parfois même des hameaux ou des paroisses situées sur une voie de communication, qui ont été tout d’abord intégrées à la ville le long de ces voies (des ‘villes-rues’) jusqu’à devenir des ‘faubourgs’, ce mot signifiant bien ce qu’il veut dire. Le faubourg parisien n’a jamais été un lieu économiquement favorisé, et ce lieu avait une conformation urbaine hésitant entre campagne lointaine - et donc équipement sous favorisé concernant les équipements viaires – eau potable, eau usée, énergie – et quartier de ville ouvrière, puisque les usines se développaient en ces endroits, loin des centres-villes historiques, trop denses. La manufacture induisait un modèle de développement économique et territorial qui n’a jamais favorisé les couches populaires. Le faubourg est devenu banlieue quand il a été entièrement englobé dans la ville, mais néanmoins son aménagement reste organisé par une voie de communication (fleuve, voie ferrée, route) et la lecture urbaine qu’on peut en faire n’est en rien satisfaisante. Le centre de la banlieue reste autour de l’église séculaire, et le tissu urbain alentour est très peu précisément défini, les fonctions urbaines sont noyées autour de l’économique, et se définissent non plus en strates historiques, comme dans la ville centre, mais bien suivant les besoins de l’économique. Une grosse usine induit des logements ouvriers nombreux, des équipements dus à la démographie, et du ravitaillement, point final. Je ne crois pas que les familles aisées habitaient en 1850 à Clichy sous Bois…

Les ZUP n’ont été qu’un avatar supplémentaire de cette logique propre à la ville de banlieue. On peu considérer cette dernière comme un déversoir de tout ce qui n’est pas praticable dans la ville centre : l’ouvrier est politiquement incorrect, a les mains sales, n’a pas d’autre culture que populaire. Les flots d’immigration successifs n’ont pas changé la donne : les Polonais, les Italiens étaient souvent accueillis dans les banlieues (comme ma famille), et ils donnaient leur temps entre l’usine et la cellule familiale. Beaucoup ne venaient jamais à Paris, sinon dans les quartiers à leur portée financière. Les mêmes flux internes à la France se sont produits, la ruralité s’est réduite comme peau de chagrin, sachant qu’à l’après-guerre, les campagnes étaient dans une pauvreté crasse, n’avaient pas vécu de reconversion industrielle, et qu’il ne restait aux pauvres qu’à aller s’agglutiner là où on pouvait les loger, dans des grandes cités d’urgence…

Le modèle d’intégration sociale – ou institutionnelle – en France continuait pendant ce temps à fonctionner suivant son modèle républicain et Rousseauïste, de l’égalité contractuelle de chacun devant ses droits et ses devoirs. Et comme le relais communal était prédominant, personne ne pouvait se trouver exclu de ce système : école laïque ouverte à tous, droit de vote aux personnes naturalisées entre temps, droits et acquis sociaux, etc.

Cependant, il est loin d’être évident que la confortation urbaine de la banlieue est suivi la courbe des besoins économiques jusqu’au bout : le grain de sable au système urbain semble bien être le chômage, puisque la fonction de ce morceau de ville tournait tout entière autour du travail générant économie, reconnaissance sociale et institutionnelle. Sans fonction économique, qu’est-ce que la banlieue sinon une coquille vide ?

Des mouvements pendulaires sont devenus fondamentaux dans les années 70, en pleine crise pétrolière par ailleurs, et si Pompidou réclamait une ville entièrement dévouée aux automobiles, ce n’est pas un hasard. Les banlieues économiquement en faillite, prenant la crise de plein fouet, ont dû changer de fonction et ne sont devenu que des lieux de logement, tandis que le gisement économique se trouvait dans d’autres îlots encore plus éloignés (les zones industrielles sont une notion tardive, qui existaient en lointaine périphérie, et qui permettaient à la base de concentrer des industries suivant des bassins de sous-traitance cohérents, tandis que la problématique de la taxe professionnelle sans redistribution à l’échelon institutionnel avant la création de communautés de communes favorisait une disparité économique entre les communes). Pire encore, la reconversion économique de la France qui s’est tournée vers le tertiaire comme principale source de revenu, a vu les fonctions urbaines se déplacer dans la ville : le tertiaire est une activité ‘noble’, en tout cas antagoniste à l’image qu’on peut se faire de l’industrie. Les zones riches ont été confortées dans leur richesse, tandis que les zones pauvres ont loupé le train de la reconversion économique… Les zones dortoires, humaines au début, sont restées en l’état et se sont inadaptées au fur et à mesure que les autoroutes fleurissaient. L’aménagement n’a pas suivi, et pour trouver un nouveau travail, dans le tertiaire – un travail plus spécifique et plus qualifié que man½uvre dans une usine – il a fallu se déplacer de plus en plus loin…

L’institution n’a pas accentué cette reconversion du point de vue éducatif, ni du point de vue urbain. On a délaissé les banlieues industrielles pour aménager avec force moyens les banlieues tertiaires. Cela a dû entraîner une paupérisation accentuée… d’autant que la main d’½uvre, accueillie lors des époques de reconstruction et de grosses infrastructures (surtout dans les transports), n’a pas suivi de requalification. A une époque, en France, on s’est retrouvé avec une main d’½uvre sous ou mal qualifiée totalement inemployable, car inadaptée aux nouveaux besoins économiques.

Comme les banlieues étaient mal suturées avec le reste de la ville, le phénomène d’îlot n’a pu que s’accentuer, jusqu’à une certaine autarcie des fonctions urbaines. Un dortoir est un lieu sans autre fonction que le logement, et devant la progression démographique de ces îlots, l’aménagement n’a en aucun cas suivi. La crise a accentué également le fossé des richesses, et ma classe moyenne s’est retirée, parce qu’elle en avait les moyens, vers des lieux plus proches des gisements d’emploi dans le tertiaire. Pendant ce temps, nombre de banlieues connaissant la mono-industrie se sont retrouvées en faillite économique lors de la fermeture d’usines non reconverties, et donc, par là même, en faillite sociale.

L’institution n’a donc pas suivi le train de la reconversion territoriale, et est restée structurée jusqu’à fort tard comme dans les années 60. Cependant, la mise en place de nouveaux échelons structurels – comme les communautés urbaines, ou les villes nouvelles tout d’abord, dans les années 70-80 – a été due au constat que la ville ne pouvait fonctionner que multipolarisée, et que la redistribution des richesses ne pouvait s’obtenir qu’en faisant coller les institutions au territoire. Cela était une première volonté de l’institution à se plaquer sur le réel. Toutefois, il est à noter que cette nouvelle donne a sans doute été brouillée par la complexité de l’appareil de l’Etat, car ces nouvelles strates s’accumulaient, et se faisant s’éloignaient de plus en plus du citoyen lambda. D’une époque où l’on connaissait la nation relayée par le département, l’arrondissement – ou le canton - et la commune, on arrivait à une structure en mille-feuilles extrêmement complexe, brouillant à mon sens la mission institutionnelle de chacun. Etat, région, département, arrondissement, communauté d’agglomération, commune, mairie de quartier, école dépendant de la commune, collège du département, lycée de la région, CAF de dieu sait qui, le citoyen est noyé dans un manque total de visibilité des services, ses droits et ses devoirs se sont noyés dans une machine technocratique ne donnant l’impression d’exister que pour elle-même, au détriment de sa gestion du quotidien. Pendant ce temps, la banlieue et ses quartiers sont restés ancrés dans le réel et une certaine perception qu’on peut en avoir.

Lorsque la société française s’est convertie à la consommation de masse et aux médias à l’américaine, la donne a été entièrement redistribuée une fois de plus. Pendant que la plupart des gens voyaient une évolution sociale promettant une progression de plus en plus rapide grâce à la facilité semblant assumée comme telle de se repaître, les quartiers en ZUP restaient identiques à eux-mêmes, malgré deux ou trois coups de pinceau par-ci par-là. Les politiques de la ville successives, essayant de renouer l’institution au quotidien par l’entremise d’un nouveau concept, la « proximité », ont certes eu certaines conséquences favorables, mais qui restent bien en deçà de ce que tout un modèle social semble pouvoir proposer. J’ai eu l’impression d’assister à du palliatif, à des strates qui s’empilent les unes aux autres, sans réflexion de fond engagées sur les modèles urbains, sociaux et institutionnels que cela implique.

Puisque le chômage accentue la frustration et le phénomène d’îlot, pourquoi ne pas avoir changé les fonctions des quartiers qui étaient devenus seulement des machines à oisiveté, des ghettos ? Pourquoi n’avoir pas pris suffisamment tôt la mesure de ce paradoxe, consistant à laisser ces derniers systèmes urbains en inadéquation totale avec le réel ? Le problème de la ville, c’est qu’une décision prise maintenant reste au minimum pour les 30 ans à venir. Une solution adaptée à une époque ne l’est plus une génération plus tard. Elle l’est encore moins deux générations après. Hors, le quartier de banlieue tel qu’il résiste dans les grandes villes de France est obsolète, non parce que les normes phoniques ne sont plus au goût du jour, non parce que le jaune canard de 1970 est devenu criard à l’½il contemporain. Non parce que l’empilement vertical est une hérésie, ou encore la densité de population. Ce n’est pas ça le problème (voir Hong Kong, contre exemple manifeste). Le problème, c’est que le quartier de banlieue n’est plus adapté à notre modèle économique actuel – il n’a plus aucune fonction urbaine. Il n’est plus adapté à notre modèle social – l’école de la cité est-elle dans la cité, ou hors de la cité ?... – il n’est plus adapté à notre modèle urbain – le centre de la ville est irrémédiablement éloigné du quartier, et reste inaccessible, comme un îlot de richesse arrogant et intouchable. Il n’est plus adapté à grand-chose, à dire vrai…

Maintenant, l’habitant est tellement coupé du réel qu’on lui expose à la figure à longueur de temps, que cette autarcie chèrement réclamée par Le Corbusier est devenue totalement perverse. L’autarcie, c’est la concurrence avec l’institution. On a substitué un ordre à un autre, l’ordre institutionnel était tellement dilué dans ces îlots que ça n’a pas été difficile que de donner dans les commerces parallèles. Et ces commerces structurent la vie de la cité, cette économie est une question de survie. Ou du moins, paraît comme telle… elle est aussi illicite que le quartier est inadapté au réel. Mais tout cela est très logique, puisqu’un quartier sans fonction est invivable, et donc il a bien fallu rétablir un simulacre de fonctions économiques. Le feu aux poudres, à mon sens, a été la menace ouverte d’une institution décalée du réel de la cité, de mettre fin à cette unique source possible de revenus. C’est une menace de négation d’un nouvel ordre social et économique qui s’est instauré au fil du temps et qui est devenu un nouveau modus vivandi. Car effectivement, l’économie parallèle est un nouvel ordre social et économique, même s’il est une régression complète face à l’ordre. La zone dite de non droit n’est pas une zone d’anarchie, c’est une zone d’un droit différent qui s’est substitué à l’institution. Cette régression est un effet pervers de l’impuissance que l’institution peut avoir dans le fait de répondre au réel de chaque citoyen, en usant d’une échelle de valeurs aussi idéologiques qu’inadaptées au réel du terrain. L’institution doit reconnaître ses torts : le nouvel ordre social de la cité a été la seule réponse possible à sa démission, à sa non analyse de la situation urbaine. Avoir tout accentué vers la reconversion économique sans prendre en compte les structures inadaptées à cette reconversion a été sa plus grossière erreur.

Si la banlieue explose désormais, c’est que l’institution met en danger un système établi – qui est bien évidemment hors la loi, mais qui en attendant est établi quand même. On ne peut pas changer un ordre établi en une semaine, la France avait quarante ans pour éviter que ce système ne se mette en place et ne s’ancre. Maintenant, l’institution est trop éloignée du réel du terrain pour se rendre compte du choc que cela provoque. La banlieue est devenue un nouvel ordre social, en îlot, un ordre régressif et un ordre en opposition, un ordre par défaut. Le nier et donner dans la répression directe, c’est aller vers un aveuglement total, vers un nouveau genre de guerre civile opposant les tenants de l’ordre contre d’autres tenants d’un autre ordre. En France, à l’heure actuelle, les droits et les devoirs ne sont en effet plus les mêmes pour tous… Le pacte du contrat social est rompu par la réalité économique, et l’institution n’a pas analysé ce fait, par confort sans doute, mais aussi par refus et par dépit.  L’institution est totalement incapable de se remettre en cause, car cette remise en cause serait une remise en cause même des institutions…

On pourrait rétablir l’ordre en banlieue en changeant complètement la banlieue même, en en redéfinissant avant toute chose les fonctions urbaines, et en remettant le citoyen au centre de l’institution. En réformant le système éducatif, pour qu’il s’adapte aux réalités économiques. En légalisant certaines pratiques qui court-circuiteraient bon nombre de trafics et de violences engendrées par l’économie souterraine (sans faire l’apologie du cannabis, évidemment). En réhabilitant non seulement l’habitat, mais surtout les services de proximité et en rapprochant les zones économiques attractives. En ouvrant le quartier à la ville et en en finissant une fois pour toute avec la logique d’îlot. Allons vers une logique tout d’abord de suture, finissons le travail commencé en 1947, allons au bout et assumons cette partie de territoire comme une parcelle intégrante de l’équation. Finissons-en avec les strates institutionnelles trop nombreuses, allons directement de la région à la communauté d’agglomération, l’échelon départemental, l’échelon municipal ne sont plus conformes à la réalité de la zone urbaine. La lecture globale du territoire demande que l’institution épouse totalement le monde tel qu’il est, et non tel qu’on continue à le voir par l’½il d’une tradition. Si l’institution collait au territorial, l’aménagement deviendrait sans doute cohérant… et les zones de non droit pourraient enfin être converties en zones de ville assumées et à nouveau institutionnalisées. 

C’est l’institution qui devrait exister pour le territoire, et pas l’inverse.
La ville devrait exister pour ses habitants, également, et la seule piste de réflexion à envisager pour commencer devrait être celle-ci, puisque c’est bien de cela que découlent l’économique et le social : il n’y a pas d’institution sans citoyen, il n’y a pas de territoire urbain sans habitant.


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#2
08-11-2005 19:45
alex54
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Le point de départ de ces émeutes est la mort des deux adolescents
...Je ne comprend pas non plus pourquoi ils brulent des voitures...peut être pour "provoquer" les forces de l'ordre?
De manière plus générale on peut voir qu'ils s'attaquent à tout ce qui représente le "système", commerces, crèches, écoles....


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#3
08-11-2005 20:22
Phil
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Moi je pense comme you et Mynight  D7

Plus sérieusement, il y a là en effet un problème qui va bien au-delà d'une simple question de vocabulaire d'un ministre, ou de deux jeunes qui se réfugient dans un transformateur.

Ces deux évenements ne sont que des déclencheurs, des gens demandent la démission de Sarkozy, se servent de cet argument pour casser un peu tout ce qui représente de près ou de loin la société, mais dans le fond, à mon avis, ça permet juste d'avoir une "vengeance" sur la partie de la société qui vit "bien". Comme le fait remarquer Mynight, ça ne s'est pas fait en un jour, j'irai meme jusqu'à dire que tous, on s'attendait à ce genre de choses.

Le problème c'est que tout le monde ou presque, à commencer par l'état, a plus ou moins abandonné les cités, en les regardant de haut, les cités sont devenues avec le temps des repères d"intouchables", ce qui n'a evidement contribué qu'à aggraver le phénomène. Il faut maintenant trouver un moyen d'améliorer ça, en améliorant le climat social, le cadre, et evidement, en favorisant l'emploi.

J'ai pu voir quelques cités "rénovées", avec des tours rasées, etc, des moyens, et en effet, ça va mieux, ,c'est pas encore Neuilly, mais c'est plus Sarajevo non plus. Pour ça, le plan Borloo peut se révéler être efficace (Borloo est d'ailleur plutot doué pour ce genre de choses, il a assez bien repris en main Valenciennes).  Maintenant , qu'en est-il des emplois ? On peut pas les inventer comme ça, c'est sur, et ça sera la clef du problème. Il faut vraiment faire un travail en profondeur sur la compréhension mutuelle entre cités et reste des villes, pour mettre un frein à la discrimination (qui n'est pas seulement raciale).

La priorité doit être avant tout le retour au calme en tout cas, car ce genre d'émeute est quand même assez hallucinant.


Pff...

#4
08-11-2005 21:08
Tonio del barrio
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C'est vrai et je vais essayé de rester neutre, objectif, sans trop de politique, mais les cités sont dans des états que personne ne mesure, je pense.

Une fois, j'ai pris le bus qui faisait chelles/aulnay sous bois pour rentrer de chez de la famille et le bus est passé cité des bosquets à Montfermeil, au début, j'avais pas réalisé et puis on est passé devant :

Des immeubles ou plutot des barres dans un état délabré, par terre

plus d'herbe mais de la terre

des voitures partout, car il doit pas y avoir de parking (eh ouai)

des immeubles abandonné

alors le béton fait la geule...

les jeunes jouent entre les tours, et le béton, entre toutes ces voitures tristes et tout ca donne un climat de pauvreté et de...je sais pas...tu as l'air ailleurs...vraiment...

Et les cités, on les découvre aujourd'hui, il y en a partout en Ile de France...cà fait longtemps que les tensions sont à vif, que le bouchon était pré a explosé, seulement il a implosé dans les cités.

Il faut dire que si on parle des immeubles, de leur isolation phonique, de leur isolation géographique, prés des autoroutes, on a un peu le sentiment que ces quartiers sont à l'écart de tout, et c'est le problême, le manque d'entretien, le fait que les logements sont trop petits, que tu peus pas rester chez toi dans 2m carré, alors tes gosses ils sortent dehors, mais dehors il y a rien, les plus chanceux, ils font de la musique, du sport mais la pluspart ils se retrouvent en bande, la même bande de gars qui en a marre d'être dans 2 mètres carré, aprés ils s'ennuient...et quand tu as 15 ans, tu es pas trop intelligent...tu as la rage...enfin là je dépasse un peu les limites du forum des grattes ciels, donc je m'arrête...mais c'est pas les 2 jeunes qui ont lancé l'histoire, ce n'est que l'huile sur le feu, sans compter les nombreux discours de notre ministre de l'intérieur, que vous retrouverez dans la presse.

Vivement que tout redevienne tranquille, un véritable plan d'urbanisme doit être présenter...mais c'est vraiment complexe...

On cite souvent Meaux qui détruit ses barres, je connais bien Meaux et c'est vrai que peus être ca peut changer les choses mais à l'échelle d'un quartiers où il y a 10 000/15 000 habitants dans des barres, c'est un problême difficile à gérer.

D2 PAZ Y TRANQUILITAD, AMIGOS DE LOS BARRIOS DE FRANCIA  D2


Visitez la partie de forum sur les villes d'Amérique latine :
- Santiago de Chile : http://www.paris-skyscrapers.fr/forum/v … 35&p=2
- Mexico City : http://www.paris-skyscrapers.fr/forum/v … 34&p=2
- Buenos Aires - Quartier Puerto Madero: http://www.paris-skyscrapers.fr/forum/v … p?id=30854

#5
08-11-2005 23:09
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Sylvain
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Pourquoi ce mouvement de révolte ne concerne que les garçons / jeunes hommes et pas leurs soeurs qui vivent pourtant dans le même cadre, dans les mêmes conditions, avec les mêmes problèmes ?

#6
09-11-2005 10:13
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Boris_F
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... il n'est pas certain que le statut des filles soit le même que celui des garçons dans la hiérarchie... De plus, les guerrières dans l'histoire sont peu nombreuses  A7


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#7
09-11-2005 21:53
Stickyesman
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Un site sur l'histoire et l'architecture du logement social:

http://www.culture.gouv.fr/culture/regi … nt-social/


PSS - Architecture, Urbanisme, Aménagement du territoire
City Forum - Ville 3D

~ Ah tu Voi c pour sa ke Seul les pti bonhomme du Baby on ldroi dShooT - Chandler Friends s06-ep06 ~

#8
09-11-2005 23:52
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AFP

9 novembre, 19h27
La crise des banlieues, poupée russe d'une crise sociale et du travail
Par Rébecca FRASQUET
Telle une poupée russe, la crise des banlieues révèle la dégradation du tissu social entraînée par le chômage de masse, la perte des repères liés au travail, l'échec de l'Etat et l'impuissance des syndicats, soulignent chercheurs et syndicalistes.
"Ces violences nous alertent sur le fait que notre monde repose sur un socle social instable: il y a longtemps eu un +malaise+ des banlieues, il y a aujourd'hui une véritable crise, intimement liée à l'absence de travail, car celui-ci est devenu un élément essentiel de la reconnaissance sociale", estime l'anthropologue Luc Ridel.
Par sa forme, cette crise rend toute médiation difficile, car à la différence d'un conflit, qui "suppose la reconnaissance d'un adversaire, néanmoins partenaire, auquel il demeure possible de parler", il s'agit ici de "violence aveugle", juge-t-il.
La crise des "banlieues" s'emboîte avec celle du modèle d'intégration républicaine incarné par l'école, explique le sociologue Alain Touraine, mais elle est avant tout sociale, affirment nombre de chercheurs et syndicats.
"L'intégration de l'immigration n'a jamais été simple, mais elle ne posait pas problème dans les périodes de plein emploi", relève Jean-Marie Pernot, chercheur à l'Ires.
"Cette crise n'est ni celle de l'immigration, ni celle de la jeunesse", juge la CGT, qui y voit la "révélation de fractures sociales creusées depuis 20 ans" et dont souffrent les "5 millions de personnes exclues de l'emploi, qui cumulent toutes les difficultés".
"30 ans d'effets d'annonces"
Même analyse dans le monde associatif qui dénonce l'amputation de ses moyens alors que l'Etat lui délègue une mission de cohésion sociale de plus en plus importante.
La "crise des banlieues est le fruit de trente ans d'effets d'annonces sur la ville, qui ne se sont jamais traduits en politiques", estime M. Pernot.
On est "en train de payer 20 ou 25 ans" de "désinvestissement de l'Etat" dans les banlieues, renchérit François Chérèque (CFDT), ancien éducateur spécialisé.
Il pointe en outre la responsabilité du patronat, "trop d'entreprises refusant d'embaucher des personnes d'originaire étrangère".
Le Medef a bien proposé des discussions sur la "diversité", qui devraient débuter début 2006, mais les syndicats craignent qu'elles ne débouchent sur une simple pétition de principe.
Le chercheur en science politique Dominique Andolfatto juge quant à lui que les syndicats ne sont pas exempts de toute responsabilité: "autrefois immergés dans le tissu social", ils sont aujourd'hui "souvent déconnectés d'un certain nombre de réalités sociales".
"Les syndicats se contentent de quelques grandes proclamations, sur la solidarité, sur l'emploi", mais "concrètement, ils n'ont pas formulé de propositions précises dans leurs orientations de congrès, sur les jeunes ou les banlieues", observe M. Andolfatto.
Jean-Marie Pernot souligne d'ailleurs que "les salariés syndiqués ont largement déserté les quartiers en difficulté, d'où une mauvaise conscience des syndicats qui, après l'Etat, ont perdu le contact avec les catégories sociales les plus marginalisées".


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#9
10-11-2005 00:56
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Le Figaro, 9/11/2005

Des cités dortoirs à la rénovation urbaine
Construits à partir des années 50, les grands ensembles de banlieue sont devenus des lieux symboles de la ségrégation sociale.

[...]Destruction de tours

En 1998, Claude Bartolone, ministre socialiste de la Ville, est le premier à lancer la destruction de tours dans les quartiers en déshérence. Jean-Louis Borloo, qui parle de «dix ou quinze ans de retard en matière de construction de logements», fera entrer cette politique dans une ère industrielle. En 2003, le ministre de la Ville fait voter une loi de programmation pour la ville et la rénovation urbaine. Au départ, elle prend effet sur cinq ans et se propose de «détruire 200 000 logements, d'en reconstruire 200 000 autres, et d'en rénover 200 000 autres».

Alors que jusque-là, les crédits relevaient de plusieurs administrations différentes, l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru), fait désormais fonction de guichet unique. En un an, selon le ministère de la Cohésion sociale, un million et demi de personnes ont ainsi vu leur quartier changer.

Mais l'Agence est aujourd'hui victime de son succès. Les délais d'attente sont trop longs. Il faut ainsi deux ans entre l'instruction d'un dossier et son aboutissement. D'où le souhait de Matignon de voir les procédures se simplifier. Au total, près de 30 milliards d'euros devraient être consacrés à la rénovation de grands ensembles. Un chiffre considérable. Même si Yazid Sabeg, président du conseil d'évaluation et de suivi de l'Anru, prévient : «Les grands ensembles accentuent les problèmes liés à la concentration des populations, mais leur démolition ne suffit pas à régler la question de la ségrégation.»


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#10
10-11-2005 10:44
tuguesh
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en tout cas je peux vous dire que de l'étranger c'est l'incompréhension totale ... tous les jours on vient me demander ce qui se passe chez nous .. La France dont le modèle social est une référence, et fait souvent le pendant de celui des Etats Unis ...

On prend une belle claque ...

En tout cas ça fait de la peine d'en être arrivé la, même si comme il a été dit un peu plus haut on s'y attendait un peu ... J'espère vraiement que cette crise puisse être bénéfique, dans le sens ou de toute façon si ce genre d'évènement n'arrive pas, les politiques ne font rien pour faire bouger les choses.

La transformation de ces quartiers risque de prendre beaucoup de temps, la croissance n'est pas pour aujourd'hui, et j'ai déjà entendu des grands frères des quartiers dire que les nouveaux jeunes dans les banlieues allaient être vraiement incontrolables ... le point de non retour a t'il été atteint ?

D'un autre côté, j'ai la faiblesse de penser que notre génération fera preuve de plus de tolérance et de fraternité, ne considérant pas que venir de la cité des 4000 ou s'appeller Aziz ou Mamadou soit éliminatoire lors d'un entretien d'embauche ou critère de refoulement à l'entrée d'une boîte.

Je crois dans nos valeurs universelles et j'espère qu'on sera capable de donner une chance à tous !

B6

#11
10-11-2005 17:04
toons
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Ah moi j'ai des infos qui ne sont que des rumeurs sur l'éclats des émeutes...
Outre le fait que 2 "jeunes" soient mort électrocutés (je ne parlerais pas des détails style ils ont fuits, ou ils étaient pourchasser,etc...) l'afflut des journalistes, des officiels des gens d'armes et des curieux aurait "géner" l'approvisionnement de drogue (scheet et herbes) dans cette citée qui serait une plaque tournantes importantes en région parisienne. les "dealers" n'auraient eu d'autres choix que de mettre le feux...

Oui je sais moi non plus je comprends pas bien, mais je pense qu'il y a tout de même un rapport avec la drogue et plus particulièrement avec la politique de Sarko...

d'autre part je sais que le racisme, la descrimination, le rejet, le "parkage" de gens à TOUJOURS existé (et ceux quelque soit les moyens). Il suffit juste de le savoir et d'y travailler tout les jours pour faire en sorte que l'on soit tous au même plan...

Un autre facteur que l'on connais tous sur les émeutes c'est bien sur le facteur de la pauvreté/misère... E7

beaucoup de chose à dire (comme le post de mynight) sur ce sujet alors je vous laisse la plume...

#12
10-11-2005 20:42
Stickyesman
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Et oui ça a malheureusement toujours existé le rejet. Dans la première partie du XIXème déjà, quand les maçons creusois montaient sur Paris pour travailler de façon durable ou saisonnière. Ils s’agglutinaient aux portes de la ville. Les sédentaires du centre les considéraient comme des barbare, des hommes subversifs. A la fin du XIXème pareil mais cette fois ci avec les italiens, qui étaient vus comme des hommes sans morale (alors que les bretons arrivé au même moment et qui commettait autant de crime n'était pas considéré comme une menace par exemple) etc. etc. L'histoire se répète un peu trop souvent :-/

Pour revenir au texte de MyNight je voudrais dire que je suis totalement d'accord avec le fait qu'il faudrait supprimer des échelons administratifs  qui n'ont aujourd'hui plus lieu. Régions et communautés d’agglomération sont suffisants. D'autant que toutes les communes sont obligées d'adhérer à des communautés de commune ou d’agglo depuis 1992 avec la loi ATR. Le pouvoir des maires est en est d’ailleurs largement diminuer notamment pour les communes proches de grandes villes comme Lyon par exemple. Ce n'est plus le maire qui décide pour les grandes lignes mais la communauté d'agglo.
On pourrait aussi remarquer que les présidents de communauté ne sont pas élu au suffrage universel direct mais par les maires eux-mêmes. Il serait donc logique de supprimer les maires qui perdent de leur pouvoir progressivement au profit d’un président d’agglo élu directement par nous B5


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#13
11-11-2005 01:21
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Une très intéressante infographie dans le Monde (10/11/2005)

http://medias.lemonde.fr/mmpub/edt/flas … rbaine.swf

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#14
11-11-2005 01:41
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Le Monde, 10/11/2005

Pourquoi un tel fiasco de la politique de la ville ?
LE MONDE | 10.11.05 | 15h11  •  Mis à jour le 10.11.05 | 15h25
   
Quel est le bilan de la politique de la ville ? La question a resurgi à l'ordre du jour avec l'embrasement des banlieues. Cette vague de violences met en lumière les "failles" de l'action publique du logement au profit des tours et des barres, selon le mot de Jean-Pierre Balduyck, président du Forum français pour la sécurité urbaine (FFSU) et maire (PS) de Tourcoing (Nord). Les émeutes urbaines soulignent aussi les problèmes grandissants qui frappent les "quartiers d'exil" : d'après le rapport récent de l'Observatoire des zones urbaines sensibles (ZUS), le chômage s'y est encore accru entre 2003 et 2004. D'autres indicateurs montrent qu'un fossé s'est creusé entre les ZUS et le reste du territoire, comme l'illustre la radiographie sociale de la Seine-Saint-Denis .

Pourtant, la République est au chevet des banlieues depuis bientôt trente ans. La politique de la ville naît à la fin des années 1970, lorsque les premiers signes de dégradation se dessinent dans certaines cités. Montée de la précarité, détérioration des grands ensembles d'habitat construits à la va-vite durant les "trente glorieuses", exode des classes moyennes accéléré par les mesures de soutien à l'accession à la propriété.[...]
par Bertrand Bissuel, avec Jean-Louis Andreani, Nicolas Bastuck, Régis Guyotat, Béatrice Jérôme et Sophie Landrin
Article paru dans l'édition du 11.11.05


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#15
12-11-2005 20:12
Stickyesman
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LE NOUVEL OBS 10-10-2005 a écrit:

L'Etat n'a jamais autant donné d'argent

par Jean-Christophe Lagarde, député, maire UDF de Drancy (Seine-Saint-Denis)

Le Nouvel Observateur. – Les banlieues s’enflamment et beaucoup accusent l’Etat de s’être désengagé des quartiers…
Jean-Christophe Lagarde. – Et pourtant, il n’a jamais autant donné. Certes, les sommes allouées par le biais des contrats de ville ont diminué de 40%, mais elles ont été largement compensées par d’autres mesures comme les contrats de réussite éducative, initiés dans le cadre du plan de cohésion sociale. Ma commune a ainsi gagné 400 000 à 450 000 euros cette année. Les fonds perçus au titre de la dotation solidarité urbaine ont aussi augmenté. Contrairement à ce que l’on pense, de gros moyens ont été débloqués en direction des villes les plus défavorisées.
Par contre, les effectifs de police ont baissé dans toute la petite couronne d’Ile-de-France. Le commissariat de Drancy devrait tourner avec 100-110 policiers, on en a en réalité autour de 80 en raison d’une gestion complètement erratique des effectifs. Mais c’est leur formation qui me préoccupe davantage : on récupère tous les gamins qui sortent de l’école de police, et qui sont aussi jeunes que ceux auxquels ils sont confrontés. Comme dans l’Education nationale, les plus expérimentés ne s’aventurent pas chez nous[…]


Sophie des Deserts  Isabelle Monnin

http://www.nouvelobs.com/


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#16
17-11-2005 01:06
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#17
17-11-2005 12:06
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AFP

16 novembre, 21h39

Violences dans les banlieues : un problème européen, selon M. Barroso

Le problème des violences dans les banlieues est européen, a déclaré le président de la Commission européenne Jose Manuel Durao Barroso mercredi à Strasbourg.
"Le problème des banlieues en France est européen car d'autres villes en Europe connaissent ces problèmes", a souligné M. Barroso lors de la conclusion du cycle de conférences-débats célébrant le 60e anniversaire de l'ENA.
"Il y a un problème d'intégration de communautés culturelles ou religieuses différentes. La dimension la plus aiguë a été observée en France", a-t-il noté, avant d'ajouter : "Ce qu'il y a de commun, c'est la crise économique avec des banlieues en France où le chômage atteint 60% chez certaines catégories de personnes".
"Il faut aujourd'hui analyser le rôle de l'école, celui de la famille, celui des comportements et des valeurs que nous transmettons à nos enfants", a-t-il encore indiqué en réponse à une question devant les élèves et anciens élèves de l'ENA.
M. Barroso a réitéré l'intention de l'Union européenne de dégager immédiatement 50 millions d'euros dans le cadre de programmes urbains pour aider la France à faire face aux conséquences des violences dans ses banlieues.
Il a également mentionné la possibilité de débloquer à plus long terme des budgets comme le Fonds social européen et des fonds structurels tout en indiquant qu'il ne s'agissait "que de mesures de solidarité" et que "cela ne résoudra pas le problème".


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#18
06-12-2005 11:49
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AFP

6 décembre, 08h00

Avec sa vache, un paysan normand veut humaniser les cités

Par Sandra FERRER
== "La vache est indispensable à la société", affirme Serge Letellier, paysan normand qui écume avec ses animaux quartiers sensibles, maisons de retraite et écoles, afin de redonner aux gens le goût de la nature.
"La vache représente la terre et la terre, c'est le lien universel entre les peuples", explique-t-il.
Pour le démontrer, Serge Letellier sera du 8 au 23 décembre en Seine-Saint-Denis avec ses vaches, ses chèvres, mais aussi des cochons et des poules. "Il faut redonner de l'espoir à tous ces gens qui n'ont plus de racines", explique-t-il.
En attendant, chaussé d'imposants sabots de bois et vêtu d'un pull vert kaki parsemé de foin, le paysan de 54 ans débarque à la Grâce de Dieu, un quartier défavorisé de Caen. Une vache, un veau et une chèvre l'accompagnent.
"Alors? qui est le plus courageux d'entre-vous?", lance-t-il à la vingtaine d'enfants venus à sa rencontre, en les invitant à venir traire Pomme, sa belle normande.
Samy, 5 ans, se lance. "Ca fait drôle quand on touche", commente le petit garçon après avoir réussi à extraire quelques gouttes de lait de l'énorme vache.
Marion, également 5 ans, touche les pis du bout des doigts. "Allez, serre bien et tire", l'encourage Serge Letellier.
"Ici, les gens sortent rarement du quartier", confie Marie-Pierre Vielle, responsable du centre de loisirs qui a organisé la rencontre.
Rachel, maman de Thibaut, 10 ans, et de Floriane, 2 ans, n'en revient pas: "C'est bien la première fois que je vois une vache par ici!".
[...] B1


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#19
12-12-2005 00:28
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Libé, 7/12/2005

La crise des banlieues doit nous ouvrir les yeux sur la crise sociale française.
Réveiller la politique de la ville

par Yves DAUGE
QUOTIDIEN : mercredi 07 décembre 2005


Trop de responsables politiques parlent de la crise des banlieues sans savoir de quoi ils parlent. Ils font référence avec aplomb et conviction à la République. Ils se rassurent et croient être entendus avec ce mot.

Mais la République qu'ils mettent en avant comme rempart à la dislocation sociale a justement failli. La République est passée à côté de ces banlieues, de ces populations, de ces jeunes qu'elle a abandonnés depuis trop longtemps. Alors revenons à la République.

Depuis l'origine, la politique de la ville, inventée par la gauche, portée avec passion autour de Pierre Mauroy par Hubert Dubedout, Bertrand Schwartz, Gilbert Bonnemaison, et par beaucoup d'hommes, de femmes, de militants de terrain, a fait constamment appel à la République. Mais cet appel n'a pas été assez entendu, trop souvent ignoré. Tous ceux qui se sont battus pour cette politique ont alerté les gouvernements successifs face à la crise montante. Certes on a créé des outils, lancé des plans, mais sans y mettre les moyens suffisants, et puis on a oublié jusqu'à la prochaine flambée de violence. Avec les alternances gouvernementales, on a aussi remis en cause cette politique. On a supprimé ce qui était engagé, arrêté des actions. Puis on a voulu réinventer, faire autrement, et cette succession d'allers-retours a été catastrophique. Malgré ces erreurs, des élus, des citoyens, des militants d'associations, des fonctionnaires, ont toujours agi au mieux, se battant pour réunir des moyens trop chichement distribués et toujours trop compliqués à obtenir dans un cadre institutionnel mal adapté, en décalage avec les situations vécues. A cet égard, il nous faut enfin des communautés d'agglomérations avec beaucoup plus de pouvoir, de moyens, élues au suffrage universel direct.[... ]


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#20
12-12-2005 00:31
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Agora Vox, 6/12/2005

Violences urbaines. Belgique : les bienfaits d’un urbanisme plus humain
mardi 6 décembre 2005.   
[...]
La Belgique est un pays qui s’intéresse beaucoup à la France, et qui sait tout aussi bien s’inspirer de ses réussites que tirer d’intelligentes leçons de ses échecs, d’autant que ceux-ci apparaissent comme nombreux. En particulier en Wallonie, dans la partie francophone du pays, le débat politique est de temps à autre influencé par les grandes questions soulevées en France : le cas du foulard à l’école est ainsi apparu sur l’agenda des responsables politiques belges de ces derniers mois et a fait l’objet d’un large débat. Il y a, à l’égard de la France, un sentiment ambigu, un mélange de proximité et de recul, d’empathie et d’incompréhension, de bienveillance et d’appréhension. Aussi, lorsqu’il s’agit d’évoquer les violences dans les banlieues françaises, le regard est-il à la fois critique, plutôt lucide, et empreint d’une certaine inquiétude, chargé d’interrogations sur les failles possibles de son propre modèle. Mais rares sont, à l’exception de quelques voix marginales, les discours prédisant de telles révoltes en Belgique : la prudence et la mesure sont de mise. A juste titre, semble-t-il. En effet, les facteurs urbanisme inhumain, confinement de populations d’origine étrangère dans des banlieues coupées du reste de la société, chômage de masse et mauvaise utilisation de l’aide sociale ne trouvent pas de points de conjonction tels semblables à ceux qu’on peut retrouver en France dans les « cités  ».

Ce dernier terme évoquerait d’ailleurs plutôt les « cités-jardins » dont le pays aurait certainement de quoi s’enorgueillir. Les années 1960 n’ont pas vu, comme en France, pousser de grands ensembles urbains de barres modernistes issues des théories fonctionnalistes. Alors que la France entreprenait des travaux pharaoniques pour reconstruire de l’habitat après les destructions de la guerre, les flux massifs de migrants tel le million de pieds-noirs débarquant d’Algérie en 1962, la Belgique poursuivait à un rythme moins soutenu l’extension de ses cités-jardins et peuplait ses cités ouvrières. Le recours à la petite propriété terrienne, très développé, ainsi que le recours massif aux bailleurs privés pour combler la demande expliquent également pourquoi, alors que l’État français assumait presque seul la question du logement
-  le privé étant de fait écarté avec le blocage des loyers - l’urbanisme n’a pas suivi la même voie. Il est ainsi aujourd’hui flagrant de constater que les moyennes et grandes villes belges ne sont pas ceinturées de grands ensembles sans âme, mais plutôt de maisons bien entretenues, où le calme règne et y est recherché. Le centre des villes n’est à l’opposé pas réservé aux populations bourgeoises, et revêt bien souvent un caractère « populaire ». Les Français sont ainsi généralement surpris, lorsqu’ils arrivent à Bruxelles, de constater que le centre est relativement peu mis en valeur et ne correspond pas vraiment à l’image du centre « historique », qui remplirait les fonctions de ville-musée et de centre commercial auxquelles ils sont habitués. C’est même dans les centres qu’on retrouve les populations les plus pauvres et la plus forte proportion d’immigrés et de personnes d’origine étrangère.

La France est du sud, la Belgique du nord

Cela ne signifie pourtant pas que la Belgique n’ait pas succombé çà et là à la mode des tours et barres d’immeubles dans les années 1960 et 1970. Mais celles-ci ont été construites dans les villes, et non à leur périphérie, et leurs habitants ne sont par conséquent pas tenus à l’écart des centres ; ils sont physiquement intégrés à la diversité urbaine.

Comme le souligne Christian Lasserre, consultant en immobilier belge (dans La Libre Belgique du 11 novembre 2005), les Français sont du sud, et les Belges du nord, différence intéressante, qui peut notamment aider à comprendre pourquoi les situations des deux pays face à l’intégration des populations d’origine étrangère, des politiques sociales et de logement sont d’inspiration différente. Libre de toute référence à de lourds principes nationaux, tels ceux du modèle républicain, la Belgique est bien plus marquée par le pragmatisme que la France, et ne tend pas à s’arc-bouter sur des principes érigés en idéaux collectifs (laïcité, égalité, refus catégorique de la discrimination positive, méritocratie...). En tant que pays du nord, la Belgique attache beaucoup d’importance à l’univers familial et à sa responsabilisation, qui passe notamment par la propriété, la France étant plus ancrée dans une tradition où le collectif prime. En outre, l’esprit de consensus, le souci de la paix sociale, s’ils impliquent des complications très problématiques au niveau fédéral entre Flamands et francophones, dont les relations sont très tendues, sont généralement une marque de la vie politique belge.
[...]
En Flandre, le danger de la surenchère communautariste

C’est certainement en Flandre qu’on peut retrouver les manifestations les plus visibles de tensions sociales ayant pour terreau les différences d’origines. La montée irrésistible et continue du parti xénophobe Vlaams Belang (ex Vlaams Blok), en particulier dans la région d’Anvers, est un symptôme inquiétant des ressentiments que peut exprimer une partie de la population flamande à l’égard des immigrés et de leurs descendants. Ce parti, qui, à côté de la rupture avec la partie wallonne de la Belgique, francophone et économiquement défavorisée, a fait du « grand nettoyage » un de ses chevaux de bataille, a recueilli 24 % des voix lors des élections du Parlement flamand du 13 juin 2004, et ne cesse d’inquiéter l’équilibre politique - fragile - du pays. Surtout, le discours caricatural de ce mouvement, deuxième force politique de la Flandre, a eu tendance à attiser une certaine surenchère communautariste, accompagnée de relents racistes. C’est ainsi qu’un groupuscule né en 2000, la Ligue arabe européenne (LAE), dont le discours, radical sous couvert d’anti-racisme, est axé sur la reconnaissance de droits spécifiques aux populations arabo-musulmanes (elle revendique l’arabe comme quatrième langue officielle de Belgique, par exemple, et pratique un certain prosélytisme religieux), se retrouve régulièrement accusée de nourrir un climat de tension. La LAE avait d’ailleurs été accusée d’avoir provoqué des émeutes raciales à Anvers, en 2002, en réaction au meurtre d’un enseignant marocain assassiné par un malade mental dans la banlieue d’Anvers. La même année, la création d’une milice prétendument anti-raciste de surveillance de la police par cette même organisation avait lancé une autre polémique. De son côté, la police n’est d’ailleurs pas non plus exempte de reproches quant à la proximité de certains de ses agents avec le Vlaams Belang et en raison de son attitude parfois discriminatoire, voire violente, envers certains types de faciès.

[...]
Mais la Région qui comporte proportionnellement le plus d’étrangers, Bruxelles-Capitale, qui recouvre plus ou moins la ville de Bruxelles et son agglomération, ne dispose paradoxalement d’aucune politique cohérente, d’aucun dispositif législatif en la matière. C’est principalement le réseau associatif, très dense, qui joue le rôle le plus important dans ce domaine.

Au niveau fédéral, la Belgique dispose cependant de structures exemplaires en matière de lutte contre les discriminations, en particulier un organisme indépendant de lutte contre les discriminations raciales : le Centre pour l’égalité des chances. Soutien juridique, appui psychologique, études et formation, médiation, actions en justice, cette structure n’hésite pas, notamment, à poursuivre les pouvoirs publics lorsqu’ils sont impliqués dans des affaires de discrimination raciale. Les plaintes y sont de plus en plus fréquentes, tant dans le domaine de la discrimination à l’embauche, de la vie sociale qu’au sujet des pratiques racistes des forces de l’ordre. Tout comme de la police de proximité, il s’agit là d’une initiative dont les pouvoirs publics français peuvent s’inspirer.

La Belgique, centre important d’immigration, ne connaît donc pas d’effet « ghetto » d’une ampleur aussi criante qu’en France. L’intégration des personnes d’origine étrangère y est moins problématique, et - surtout ? - l’urbanisme inhumain des cités françaises n’y a aucun équivalent. Certes, la Belgique n’échappe pas au phénomène des discriminations raciales, à tous les niveaux. Mais ce pays, où le ministre de la culture est une femme d’origine marocaine, devrait probablement inspirer davantage.


Auteur : Mathieu COLLET, Euros du Village


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#21
13-12-2005 00:42
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Batiactu, 12/12/2005

Nicolas Sarkozy pour «un urbanisme plus participatif»

Le ministre de l’Intérieur a jugé vendredi qu’«on ne pouvait laisser les architectes (…) décider seuls de la configuration de quartiers dans lesquels ils ne vivront pas», et a appelé de ses voeux un «urbanisme plus participatif».

«Les habitants pourraient utilement participer à la conception et à la réalisation des projets. Il est temps de jeter les bases d'un urbanisme plus participatif, qui favoriserait l'avènement d'un cadre de vie choisi et non subi», a-t-il dit devant l'association des maires des grandes villes de France. «On ne peut laisser, quelles que soient leurs qualités, les architectes et les experts des cabinets d'études décider seuls de la configuration de quartiers dans lesquels ils ne vivent pas et ne vivront pas», a-t-il poursuivi.

Le ministre de l’Intérieur a répété sa volonté d'instaurer un «avis sur les opérations d'urbanisme» émis par des spécialistes de la sécurité, et son souhait de réorienter la politique d'aménagement du territoire des zones rurales, vers les quartiers sensibles. Souhaitant impulser une «politique volontariste de mixité sociale» dans ces zones, il propose que soit relogée «une part significative de la population hors de ces quartiers difficiles, sans augmenter leurs loyers».

Par ailleurs, il a répété sa volonté, inscrite dans son plan de prévention de la délinquance, d'instituer des abattements de charges sociales pour l'embauche de gardiens dans les copropriétés.

(Entre nous, ces idées sont déjà dans la pratique fortement utilisées... On est peut-être davantage ici dans le domaine de la comm politique que dans la réglementation... )


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#22
15-12-2005 23:49
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LE MONITEUR 15-12-2005

Urgence des banlieues : la réponse des architectes

[...]

LES ARCHITECTES DANS LE DEBAT

Si les grands ensembles ont été construits pour résoudre une crise du logement sans précédent au moment de l'après-guerre et de l'industrialisation, leur abandon progressif par les couches moyennes, attirées par l'habitat individuel, a fait d'un grand nombre de ces quartiers des lieux de relégation sociale.
L’Etat a engagé, depuis longtemps, différents plans d’action sans pouvoir enrayer les problèmes.
Aujourd'hui, le gouvernement s'est engagé dans un programme national de rénovation urbaine ambitieux, tel que défini par la loi du 1er août 2003 qui prévoit jusqu'en 2008 :
- une offre nouvelle de 200 000 logements locatifs sociaux,
- la réhabilitation et la résidentialisation d’un nombre équivalent de logements sociaux
- la démolition de 200 000 logements.

L'objectif est de changer l'image des quartiers et de réduire la concentration des populations en situation de fragilité sociale, en construisant des logements ouverts à d’autres types de populations avec la Foncière Logement et des opérateurs privés.
Pour ce faire, l'ANRU (Agence Nationale de Rénovation Urbaine), est chargée de centraliser les crédits nationaux consacrés à l'aménagement et au logement social et de les affecter aux projets de démolition-reconstruction proposés et définis par les Collectivités Locales.

CE QUE NOUS EN PENSONS

Nous approuvons la décision de l'Etat de s'investir dans les quartiers et d'y engager des moyens et des programmes ambitieux de restructuration urbaine. Nous approuvons également la notion de guichet unique chargé de simplifier les démarches des collectivités et des bailleurs, ainsi que les grands principes prônés par l’ANRU (désenclavement, maillage, mixité, résidentialisation,…)

Mais nous craignons :
- que l'urgence de la situation et la focalisation sur une reprise uniquement quantitative en termes de création de logements masquent les véritables enjeux ;
- que les programmes réduits à leur seule valeur de produit économique, ne soient pas pensés comme constitutifs de l'urbain ;
- que l'on diminue le parc de logements sociaux
- que le logement collectif laisse place à du logement individuel, consommateur d'espace et d'énergie
- que les habitants des logements détruits soient déplacés vers une destination qu'ils n'ont pas choisie, pour un appartement souvent plus petit et plus cher.
- que l'égalité territoriale soit malmenée du fait des critères de sélection des projets et par le fait que les interventions à caractère social et économique sont laissées à la seule initiative des collectivités locales.
- que les territoires des opérations concernés soient trop limités et que l’on reporte ainsi les problèmes sur d’autres zones

LES ARCHITECTES PRENNENT POSITION

Le mal-vivre des banlieues interpelle fortement les architectes. Les médias ont couvert largement les évènements, sans pour autant nous associer au débat.
Les Conseils régionaux de l'Ordre des Architectes d'Ile-de-France et de Provence-Alpes-Côte-d'Azur affirment leur volonté de contribuer à :
- la réflexion sur la banlieue, en revendiquant leur légitimité à intervenir dans l'aménagement de l'espace et du cadre de vie ;
- l’offre de choix et de mobilité résidentiels diversifiés ;
- à toute lutte contre la «ségrégation» spatiale, facteur d’exclusion ;

LA DEMOLITION NE DOIT PAS TENIR LIEU DE PROJET URBAIN.

La démolition doit être pensée comme un outil parmi d'autres de la recomposition urbaine et non comme un objectif en soi.
D’autant plus que certaines restructurations, mêlant réhabilitations lourdes et constructions neuves (comme Lorient) ont porté leurs fruits.
L’annonce des démolitions a suscité un climat anxiogène dans certains quartiers car les démolitions ne prennent pas suffisamment en compte l’attachement des habitants à leur quartier et sont vécues comme une négation de leur passé. L’état de dégradation de certaines cités est davantage lié au manque d’entretien et d’aménagement, qu’aux dégradations dues aux habitants, lesquels ressentent cette situation comme une forme d’abandon des pouvoirs publics.
Certaines démolitions sont aussi perçues comme un prétexte pour envoyer «ailleurs» des populations non souhaitées ;
La modernité de l’architecture de la reconstruction doit être assumée sans stigmatisation. En effet, la ville se constitue par un processus lent d'intégration historique. La forme «architecturale» n’est pas criminogène en elle-même.

LA DENSITE N’EST PAS «LE» PROBLEME

La densification fait peur. Pourtant il faut distinguer entre densité réelle et densité vécue. Les grands ensembles sont, même s’ils sont hauts, peu denses.
Leur densité équivaut à un coefficient d’occupation du sol de 0,6 à 0,7 en moyenne, parfois moins, alors que l'îlot Haussmannien a un COS, 7 fois supérieur. Si la typologie des barres et des tours donne une impression d’entassement, d’écrasement, de monotonie et un caractère impersonnel, c’est lié à la démesure des espaces bâtis et des espaces extérieurs.
Le grand ensemble n’est en général pas dense, mais il concentre néanmoins les plus démunis dans une forme de « ghetto » qui rend l’intégration urbaine et sociale difficile et justifie leur rénovation.

LE PAVILLONNAIRE N’ENGENDRE PAS UNE VILLE DURABLE

La demande de maison individuelle est toujours forte mais nous pensons que la «Maison à 100 000 €» n'est pas une réponse urbaine adaptée, ni sur le plan social, ni en termes de développement durable. Les lotissements engendrent autant de monotonie, consomment les terres cultivables, provoquent l’éloignement et sont coûteux pour les finances publiques. Nous considérons qu'il s'agit là d'une forme de régression aussi grave que celle qui a présidé à la construction en masse des grands ensembles.
La qualité du logement social a progressé ces dernières années, dès lors qu'il a été pensé en relation avec son contexte urbain. Il engendre, dès qu'il s'autonomise du contexte et devient « un produit », un urbanisme répétitif et anonyme (cf. «chalandonnettes») peu porteur de cohésion sociale.

POUR UN URBANISME PARTAGE

L'urgence ne justifie pas que l’on fasse l'économie de la consultation des habitants à la définition de leur cadre de vie. Il est essentiel de donner aux habitants les moyens d'agir sur leur propre environnement et les programmes, en les considérant comme des citoyens responsables.

POUR UN LIEN URBAIN

La cohésion sociale implique le désenclavement des quartiers, la desserte des quartiers par les transports en commun, la continuité de l’urbanisation (inscrite dans les règlements d’urbanisme) et l’intégration des quartiers dans la Ville par le maillage urbain. Tous les liens, même les plus ténus, qui peuvent relier les grands ensembles à leur environnement urbain sont à créer pour solidariser les quartiers à la ville.

POUR DES ESPACES PUBLICS REQUALIFIES

Les espaces publics des banlieues doivent être requalifiés et aménagés avec le même soin qu’en centre ville (revêtements de sol, mobilier urbain, plantations,…) et accueillir une densité et mixité programmatique qui donne corps « au vivre ensemble ».

POUR DES FORMES URBAINES ET DES FORMES D’HABITAT RENOUVELEES

Les grands ensembles, ne sont pas les seuls quartiers en difficultés, mais représentent une opportunité pour l’intervention publique et le projet urbain dans la mesure où la collectivité dispose de la maîtrise foncière.
Ce sont donc paradoxalement des territoires privilégiés pour l’action, à condition que les réalisations soient réalisées dans une perspective de création de valeur foncière et patrimoniale. [...]



Ce texte a été rédigé conjointement par les Conseils Régionaux d’Ile-de-France et de Provence-Alpes-Côte d'Azur 

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#23
16-12-2005 11:38
S
shiwaz
Membre
S
Date d'inscription: 11-12-2005
Hors ligne

Excellente analyse, complète et impossible à taxer de superficialité !

Je voudrais ajouter une observation cependant.

La ville de banlieue n'est pas un système physique fermé, soumis à ses seules forces internes, dont le devenir est inscrit dans la résolution d'un système d'équations sociales parfaitement déterminé, à un facteur de proportionnalité près. Elle est soumise à une immigration incontrôlable et déstabilisante en ce sens qu'elle appporte avec elle sa propre économie souterraine, dont l'origine n'est pas locale, ou ses modes de vie inadaptés à nos villes européennes.

Par exemple, en ce moment dans mon quartier, de nombreuses familles afghanes s'installent, sitôt passée la frontière, et les femmes en burkas deviennent aussi nombreuses qu'à Kaboul, plus peut-être depuis que les talibans en ont été chassés. Une famille kurde s'était installée dans la copropriété où j'habite. Force est de constater, sans aucun jugement de valeur à leur encontre, que ces nouveaux immigrants posent des problèmes inattendus :
- ils vivaient les fenêtres ouvertes, hiver comme été, qu'il vente qu'il pleuve ou non, même lorsqu'il gelait à pierre fendre. Autant vous dire que la consommation de calories à l'échangeur du chauffage urbain sur lequel nous sommes connectés a fait un spectaculaire bond en avant, et les charges de chauffage à l'avenant ! Gentiment relancés sur ce point par le conseil syndical, ils ont toujours opposé un refus catégorique en invoquant leur droit de vivre comme ils l'entendaient. Que faire en pareil cas ? Le proprio a fini par intenter une action en justice et a obtenu leur expulsion, récupérant en retour un appartement ravagé, et un an de travaux de remise en état, quand le bâtiment va, tout va. Les enfants de cette famille n'avaient pas attendu la crise des banlieues pour ravager systématiquement tout ce qui leur tombait sous la main, c'est-à-dire les points lumineux des jardins, tout juste changés, les espaces verts, et ont mis hors d'usage à coup d'objets divers les tableaux extérieur de distibution de gaz, ce qui a obligé à couper l'alimentation pendant le temps nécessaire à leur remise en état, et plus par sécurité. Pourquoi tant de haine ? Ils avaient été accueillis au départ aussi bien que ne l'avaient été tous les autres locataires et propriétaires. Il y a une mixité évidente dans la copropriété, noirs blancs et asiatiques y sont mélangés sans problèmes. Du moins jusqu'à très récemment.

Le trafic d'héroïne en provenance d'Afghanistan, en direct du producteur au consommateur, s'est ajouté au cannabis en provenance du Maroc et des Pays-Bas, et au crack d'implantation récente ici, à ce qu'il me semble un an ou deux. En vingt ans, une cité calme répondant assez bien au modèle d'intégration idéal souhaité par beaucoup, s'est muée en quartier sordide où règnent les petits mafieux, très peu nombreux d'ailleurs, mais avec la complicité active sinon volontaire de la municipalité, qui ferme les yeux et croit acheter la paix sociale par diverses mesures d'apaisement, comme par exemple donner un emploi de moniteur de centre aéré à un dealer notoire archiconnu des services de police. Si je me mêlais de dénoncer cet ... impair, je serais traîné devant les tribunaux pour racisme, alors que toute ma vie j'ai travaillé avec des gens en provenance d'Afrique dans un respect mutuel total, et j'ai gardé de vrais amis retournés vivre en Tunisie après une vie de labeur en France.

Sans aucun extrémisme, sans aucune dérive extrême-droitière, force m'est de constater que des populations absolument pas adaptées à l'habitat tel que nous le pratiquons ont sur nos cités des effets dévastateurs, non prévus par les urbanistes et les architectes, sans que ce soit une faute de leur part. Les planificateurs ont fait ce qu'ils croyaient être le bien des populations, mais la clientèle a bien changé, et cela seul ne convient plus.

Nous avons voulu résoudre des problèmes de logement et créé des quartiers dortoirs qui ont des défaut, mais qui ne sont pas aussi moches et inadaptés qu'on l'on croit parfois, je le sais, j'y vis.

Mais il faudrait au moins que la population qui y réside observe des règles de vie en commun que nous avons le tort de considérer comme allant de soi.

Créer des équipements collectifs adaptés, par exemple des lieux de culte, essentiellement des mosquées ? Ca paraît jouable à première vue. Mais alors il faudra des mosquées sunnites et des mosquées chiites, car les deux obédiences non seulement ne se mêlent pas mais se haïssent à mort, le terme n'est pas exagéré. Au lieu d'apporter la paix et la plénitude de l'âme aux croyants ainsi reconnus, on édifiera les emblèmes d'une guerre de religion sans pitié qui se joue au Pakistan, en Irak, à Ceylan ... Je n'y vois pas une solution, ni temporaire ni définitive !

Notre  tort  est sans doute de croire le monde entier à notre image, or il ne l'est absolument pas. Messieurs les urbanistes, mesdames et messieurs les élus locaux, avec toute votre science et votre bonne volonté, vous ne pourrez pas à vous seuls résoudre le problème. Individuellement, tout homme pourrait très probablement s'insérer dans le modèle social français, même s'il devait comme tous connaître la difficulté de trouver un job convenable et si le bonheur n'est pas de ce monde. Mais la pression qu'exerce sa collectivité culturelle, il ne s'agit pas de problème racial ici, absolument pas, est telle cette pression que son comportement va demeurer inadapté à notre façon de vivre à nous, qui a aussi ses spécificités ne l'oublions pas.

Bien entendu, tout ce que votre analyse fine met en lumière est absolument vrai également, et il faut continuer à penser la ville et à concevoir l'habitat. Mais comment éviter le communautarisme et ses effets indésirables, c'est un autre problème, il faudra bien s'attacher à trouver des solutions, troubles des banlieues ou pas. Méthode cartésienne, diviser la difficulté en autant de problèmes élémentaires qu'il se peut faire ...

En tout cas, merci pour votre remarquable effort de réflexion en profondeur, il m'a éclairé sur des points auxquels je n'avais pas pensé, ça vaut bien un smiley enthousiaste .

#E2

#24
16-12-2005 12:21
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Boris_F
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Merci pour ton témoignage éclairant et personnel, Shiwaz. Je suis d'accord sur le fond à propos de ce que tu dis. On aura le temps de continuer à essayer de comprendre tout cela, au vu de la complexité du problème...


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#25
18-12-2005 00:51
Stickyesman
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LIBERATION 15-12-2005

Châteaux de cartes
Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, les barres HLM étaient une architecture admirée, l'assurance d'un logement décent. Elles cristallisent aujourd'hui les maux des banlieues. Bien loin de cette fierté arborée sur cartes postales.

par Sibylle VINCENDON


  On l'avait oublié : les grands ensembles ont été des monuments. Des objets de fierté qu'on photographiait pour en faire des cartes postales. Ainsi, de même qu'on envoyait ses bons baisers au dos de la cathédrale de Chartres, on les expédiait en exhibant la ZUP de Fontenay-sous-Bois ou les 4 000 de La Courneuve. Une idée qui paraît bien étrange aujourd'hui : il suffit de voir l'étonnement que suscitent les cartes postales qu'a réunies le photographe Mathieu Pernot ­ contrepoint au travail qu'il mène par ailleurs sur les démolitions ­ et dont nous présentons quelques exemplaires. Des barres, des tours, sont fixées en majesté sur fond de ciel bleu, selon les canons du genre. Et l'on peine à se convaincre qu'une telle architecture ait pu être admirée, tant il est d'usage de nos jours de la détester.

Pourtant, il y avait de quoi éditer des cartes postales. Lorsqu'une famille emménageait dans un grand ensemble, bien souvent elle découvrait le bonheur. A la fin des années 50, en pleine guerre d'Algérie, quatre millions de logements manquaient en France, un quart de ceux qui existaient étaient surpeuplés, 20 % sans point d'eau intérieur, 40 % seulement avec un cabinet de toilette (1). Les logements supposés «provisoires» destinés aux sinistrés de la Seconde Guerre étaient toujours là, les bidonvilles de la région parisienne comptaient couramment plusieurs dizaines de milliers d'habitants. En 1962, la moitié des ménages de la région parisienne ne disposait pas de WC privés. Tout s'accumule : les retards constructifs de l'entre-deux-guerres, les destructions de la Seconde Guerre mondiale, le retour des rapatriés d'Algérie, la montée de l'immigration des Trente Glorieuses.[...]

(1) Loger le peuple, de Jean-Paul Flamand (La Découverte, 2001).

(2) Libération du 5 novembre.

http://www.liberation.fr/page.php?Article=345063


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