Hanoï (Viêt Nam)

Les matériaux utilisés semblent de bonne qualité et les finitions bien réalisées (contrairement a tous les immeubles construits actuellement), on retrouve des petits jardins régulièrement au 2è niveau etc... Du coup il adopte vraiment un style architectural européen, on regrette de ne pas retrouver une touche de l'architecture locale. Il faut noter la présence d'une grande couronne de verre au centre du bâtiment située au dessus de l'hémicycle qui doit ressortir sur 5/6 mètres de haut et qui est illuminée en blanc la nuit. C'est a ce moment la que le bâtiment ressort le plus et affiche son importance (j'essaierai de prendre une photo a l'occasion, mais j'ai rarement l'occasion de passer dans ce quartier de nuit). De jour, mis a part la grande esplanade devant le bâtiment, la sécurité renforcée et l'immense drapeau sur le toit rien n'indique qu'il s'agit d'un bâtiment officiel (il faut aussi noter que le Parlement n'est pas encore terminé, mais je suppose que la livraison approche).

Premières impressions... Une circulation d'enfer avec ses nuées de scooters. Les trottoirs servent de parkings, donc obligation de marcher sur la route (mis a pas les grandes avenues du centre). Pas de transports en commun, quelques lignes de bus trop remplies. Il faut s'habituer a traverser n'importe comment, les scooters ralentissent, évitent mais ne s’arrêtent jamais. Au début, on attend plusieurs minutes avant de s'élancer !
L'animation dans les rues est vraiment impressionnante ! Tout se passe dans la rue, les étals des magasins squattent les trottoirs, les coiffeurs s'installent juste avec une chaise et des ciseaux et tout le monde se croise dans un joyeux bordel. Et tout le monde conduit main sur le klaxon, c'est vite fatiguant, faut s’habituer !
Mais, la vie de nuit est quand même sacrément limitée : les bars ferment a minuit pile (sinon la police rentre et vire tout le monde a grands coups de sifflets). Les boites qui ferment plus tard sont justes celles ayant assez d'argent pour graisser la pâte du fonctionnaire de service, jusqu’à 3h du matin max !

Concernant la modernité, Hanoi a la chance d’être très préservée pour le moment. Le vieux quartier et le quartier français sont pour le moment épargnés, les grands ensembles sont construits en périphérie, et les tours de bureaux se multiplient le long des grands axes, très peu dans le centre. Donc pas de sensation apparente de modernité (contrairement a Bangkok, ou les transports sont neufs et les constructions se multiplient a chaque coin de rue.)
Il existe cependant une avenue le long de laquelle on trouve de nombreuses tours récentes, ainsi qu'un peu plus loin le Hanoi Museum inauguré en 2012 je crois. Je n'ai pas eu le temps de me balader dans ce quartier, mais je pense que les photos pour illustrer cela ne devraient pas tarder 

Aujourd'hui, on enchaine avec le temple de la Littérature, siège de l'ancienne université entre le 15e et le 18è siècle si mes souvenirs sont bons. C'est aujourd'hui un temple entouré de petits jardins très agréables.

27.


28.


29.


30.


31.


32.


33.

Quelques photos au hasard des rues...

34.


35.


36.


37.


38.


39.


40.


41.


42.

Direction le Hanoi Museum de GMP Architekten (Voir cet article sur Archdaily) datant de 2010. C'est une pyramide inversée, dans laquelle une rampe façon Guggenheim permet de desservir tous les étages. Le contenant est plutôt pas mal, mais le contenu censé montrer l'histoire de la ville de Hanoi, qui est millénaire, est pauvre et l’accessibilité du musée nulle.

La suite en photos.

43.


44.


45.


J'en parlais plus haut, c'est ce quartier qui voit les tours se multiplier. Un peu a l'image de la Cheick Zayed Road, ça fait un corridor de gratte-ciel, plus ou moins élégants. Je n'ai pas eu le temps de m'y attarder, mais j'y retournerai a l'occasion.

On trouve ainsi l'ensemble Keangnam composé de l'actuelle pour haute tour du Vietnam avec ses 72 étages et 336 mètres accompagnée par 2 tours jumelles de 48 étages et 212 mètres.

46.


En 2016, elle devrait être dépassée, toujours a Hanoi, par la Vietinbank Tower 1 du haut de ses 368 mètres avec une petite sœur de 250 mètres. Le toit en forme de V rappelle ainsi le nom de la banque que la tour hébergera. Elle a été dessinée par Norman Foster.



VIR.com

Des immeubles de différents styles se côtoient...
47.


48.


49.


50.


51.

52.


53.


54.


55.


56.


57.

Quelques vues rapides depuis le 13è étage de la tour de la BU de l'Université d'Architecture de Hanoi (portable + vitres sales).

Ce quartier du Sud-Ouest, le long de l'une des radiales qui va vers le centre, est l'un de ceux qui voit le plus de constructions. L'édification d'une ligne de métro sur cette artère devrait aider a décongestionner l'intense circulation alors que les tours de logements se multiplient.













Depuis le sol

Quelques exemples d'une espèce de soupe néo-haussmannienne dont ils raffolent ici...

58.


59.


60.


61.


62.


63. Détails


64.

65. Grand parc autour du lac Ho Bay Mau, c'est un des endroits privilégié par les habitants de Hanoi pour faire leur sport... C'est aussi un parc accueillant de nombreuses attractions datant de l'ère communiste (un peu comme on en voit en Corée du Nord) -et qui sont en état d'abandon- qui donnent une atmosphère vraiment spéciale au lieu...



66. Autos-tamponneuses d'un autre age



67.


68.


69.


70.


71. La "grande" roue


72.

73.


74.


75.


76.


77.


78. Autour du lac


79.


80.


81.


82.

83.


84.


85.


86.


87.


88.


89. On retrouve ce genre de statues partout dans le parc


90.


91.


92.

Après avoir quitté Séoul sous la neige pour passer quelques jours au Vietnam, je peux confirmer les impressions de Maza. La nuée de scooters dans les rues de Hanoi, les klaxons incessants (également sur les routes de campagne) sont une impression nouvelle. On apprend vite la technique pour traverser : il suffit de marcher de manière régulière, de regarder les scooters pour évaluer leur vitesse mais surtout de ne pas s'arrêter car le plus important est d'avoir un comportement prévisible. Ils ne roulent pas très vite et peuvent donc ralentir.

D'ailleurs, même sur les grands axes (le pluriel est un peu exagéré, puisqu'il y a une seule route qui va du nord au sud, et elle ne comporte qu'une voie dans chaque sens), les voitures comme les trains roulent à 40-50 km/h. Il faut être patient...

Je ne vais pas ajouter aux photos de Maza les miennes, car ce serait à peu près les mêmes monuments vus avec un simple téléphone portable...

Mais je dirai tout de même quelques mots sur la particularité architecturale des maisons de Hanoi (et d'une partie au moins du Vietnam), à savoir les maisons-tubes. Pour des raisons semble-t-il fiscales (l'impôt foncier porterait sur la largeur des façades), la plupart des maisons sont très étroites et très profondes. Cette forme est ancienne et elle se perpétue, y compris dans les campagnes où les maisons les plus récentes s'étendent en profondeur et en hauteur derrière des façades de quelques mètres de largeur seulement.

Le paysage urbain est très fortement marqué par cette architecture originale. Depuis les airs, on pourrait voir un parcellaire en longues lames parallèles. Depuis le sol, on voit une rapide succession de façades très étroites mais toutes différentes. Le tumulte des façades fait écho au tumulte des rues.

Voici quelques photos personnelles, prises à Hanoi et dans les environs (la première a déjà été montrée par Maza...), et à la fin une animation 3D d'une agence d'architecture qui montre bien à quoi ressemble l'espace intérieur de ces maisons (plus elles sont récentes, plus elles sont élevées, tout en restant toujours aussi étroites).









Quelque part entre Hanoi et la mer :





La vidéo (le plus surprenant est sans doute à l'entrée de la maison à 50'  ):

Thierry a écrit:

D'ailleurs, même sur les grands axes (le pluriel est un peu exagéré, puisqu'il y a une seule route qui va du nord au sud, et elle ne comporte qu'une voie dans chaque sens), les voitures comme les trains roulent à 40-50 km/h. Il faut être patient...

Oui, ne jamais être stressé et toujours partir en avance... La seule route "rapide" a Hanoi est l'autoroute surélevée qui sert de périph ou l'on peut tenter un 70 en vitesse de pointe 

Pour les maisons tubes, je n'ai rien a ajouter. L'article que tu as posté sur ton bloc-notes présente très bien la situation.

J'en profite pour poster une nouvelle série, avant de passer éventuellement a des paysages un peu plus ruraux (Baie d'Halong, tout ça, tout ça !).

93. Musée des Beaux Arts, situé dans un ancien collège catholique pour jeunes filles construit en 1930 par les français.


94.


95. Opéra de Hanoi, inspiré de l'Opéra Garnier a Paris, il a été inauguré en 1910.


96.


97.


98. Ancien garage (Peugeot ?) transformé en bureaux


99.


100. Ministère de l'économie si je ne dis pas de bêtise.

101.


102.


103.


104.


105.


106.


107. Gare de Hanoi, construite par les français également. La partie centrale n'est évidemment pas d'origine.


108.


109

Maza a écrit:

Thierry a écrit:

D'ailleurs, même sur les grands axes (le pluriel est un peu exagéré, puisqu'il y a une seule route qui va du nord au sud, et elle ne comporte qu'une voie dans chaque sens), les voitures comme les trains roulent à 40-50 km/h. Il faut être patient...

Oui, ne jamais être stressé et toujours partir en avance... La seule route "rapide" a Hanoi est l'autoroute surélevée qui sert de périph ou l'on peut tenter un 70 en vitesse de pointe 

En passant a Da Nang, ville du centre qui est en train de se transformer en méga-cité balnéaire avec un chapelet de grands hôtels (et où j'ai emprunté un kitschissime pont-dragon), j'ai vu en revanche un urbanisme à l'occidentale (et : doubles voies, trottoirs larges... Le mini-bus qui m'amenait à l'aéroport a bien poussé à 80 km/h sur la route qui était d'ailleurs déserte (oui, c'est possible) !

110. Tu parlais de la largeur des façades, encore d'autres exemples...


111. Mais on voit de plus en plus de grands ensembles du style

le renard a écrit:

Les KTTs : une appropriation originale de logements collectifs
9 jan 2015, par Epicurban

De grandes boites de métal colorées accrochées aux façades, des restes d’enduit jaune encore perceptibles, des petits commerces partout en pied d’immeuble et une vie de quartier manifestement animée. Ce n’est pas la description que l’on s’attend à lire au sujet d’un quartier de logements collectifs construits sur le même modèle que des casernes militaires. Et pourtant, les KTT hanoiens sont un cas original d’appropriation très abouti d’immeubles collectifs par leurs habitants.

...

http://www.demainlaville.com/les-ktts-u … ollectifs/

112. Il me semble que c'est ce genre d'immeuble


113.


114.


115.


116. Lotte Center, 67 étages, 267 mètres. Surement l'une des tours les plus élégantes de Hanoi.


117.


118.


119.

Ce contraste sur les deux dernières photos !

Maza a écrit:

le renard a écrit:

Les KTTs : une appropriation originale de logements collectifs
9 jan 2015, par Epicurban

De grandes boites de métal colorées accrochées aux façades, des restes d’enduit jaune encore perceptibles, des petits commerces partout en pied d’immeuble et une vie de quartier manifestement animée. Ce n’est pas la description que l’on s’attend à lire au sujet d’un quartier de logements collectifs construits sur le même modèle que des casernes militaires. Et pourtant, les KTT hanoiens sont un cas original d’appropriation très abouti d’immeubles collectifs par leurs habitants.

...

http://www.demainlaville.com/les-ktts-u … ollectifs/

112. Il me semble que c'est ce genre d'immeuble
http://img4.hostingpics.net/pics/247333IMGP7845.jpg

Je n'avais pas vu cet article, qui explique bien l'une des impressions que j'ai eues à Hanoï. Venant d'un pays, la Corée du Sud, où l'architecture résidentielle est uniformisée et réduite à des produits standardisés, j'ai eu un choc en voyant la diversité des bâtiments à Hanoï (en plus du choc thermique  ). Même si les bâtiments du centre-ville ont souvent le point commun de la façade étroite, l'aménagement de la façade varie de manière considérable d'un immeuble à son voisin.

On a en effet l'impression que, outre les fantaisies des constructeurs (colonnes, terrasses, etc.), les habitants eux-mêmes transforment le bâtiment, rajoutent des vérandas, des extensions, des décorations... De même que scooters et commerces se partagent le trottoir (tant pis pour le piéton), les rez-de-chaussée des bâtiments résidentiels sont largement ouverts sur la rue, au point qu'on entrepose dans le salon le vélo, le scooter ou, pour les plus riches, la voiture.

Le résultat est un joyeux bordel et un spectacle permanent, si on sait aller au-delà de l'impression initiale (« c'est n'importe quoi ! ») de l'Occidental pour qui la norme est l'harmonie haussmannienne.

le renard a écrit:

Ce contraste sur les deux dernières photos !

Effectivement. Ceci dit, ce genre de contraste est au final assez répandu. Il ne cesse de m'étonner mais c'est bien la ville telle qu'on la connaît en France, et dans une partie de l'Europe continentale, qui semble être une exception. Même la ville anglo-saxonne présente ce genre de contraste, mais bien plus édulcoré, avec des dimensions qui varient dramatiquement.

Moi ce qui me marque c'est la présence de ce néo-haussmanien en hauteur. C'est très intéressant et en rupture avec la pratique internationale et francaise. Dans un monde post-colonial, c'est inatendu.

samussas a écrit:

le renard a écrit:

Ce contraste sur les deux dernières photos !

Effectivement. Ceci dit, ce genre de contraste est au final assez répandu. Il ne cesse de m'étonner mais c'est bien la ville telle qu'on la connaît en France, et dans une partie de l'Europe continentale, qui semble être une exception. Même la ville anglo-saxonne présente ce genre de contraste, mais bien plus édulcoré, avec des dimensions qui varient dramatiquement.

Moi ce qui me marque c'est la présence de ce néo-haussmanien en hauteur. C'est très intéressant et en rupture avec la pratique internationale et francaise. Dans un monde post-colonial, c'est inatendu.

En France, le contrôle des hauteurs empêche la plupart du temps de produire ces contrastes ; les tours, sauf exception, sont isolées du reste de la ville. Il y a toutefois des exceptions (exemple  ).

Ce genre de contraste est en effet très courant en dehors de la France. À Séoul, par exemple, il n'y a guère d'intermédiaire entre le petit résidentiel (maximum 5 étages) et les grands ensembles (couramment 20 à 40 étages de nos jours). Là encore, les règlements de construction, qui définissent cette catégorisation, jouent un rôle important.

Quant au néo-haussmannien (enfin, certains aspects de l'haussmannien), la situation de Hanoï est particulière parce que la ville a conservé un important patrimoine architectural français, donc c'est des motifs familiers pour les Vietnamiens. De plus les maisons que j'ai vues révélaient un goût manifeste pour l'ornementation et l'architecture voyante. Un toit dans le style français, ça doit faire un argument de vente.

Comme souvent a Hanoi, les tours sont isolées dans un environnement relativement bas, ce qui fait que les contrastes sont récurrents. Dans ce cas, la tour est placée dans une petite rue, ce qui accroit l'impression de hauteur par rapport au bâti environnant du fait du manque de recul dans la rue pour la prise de vue.

Concernant le néo-haussmanien qui est vraiment très présent a Hanoi, ce n'est quand même pas une spécificité vietnamienne. Les chinois en sont assez friands (même si le Paris chinois avec sa réplique de la Tour Eiffel reste désespérément vide) par exemple. Il me vient en tête également un projet de centre commercial a Doha. La spécificité de Hanoï c'est la quantité d'édifices qui utilisent cette inspiration. Certains se contentent juste du toit, d'autres misent vraiment sur l'ornementation des façades a grands coups de colonnes, grilles en fer forgé... de plus ou moins bon gout.

120. Encore quelques clichés de cet hôtel


121.


122.


123. La fête du Têt arrive... et l'anniversaire du Parti aussi ! Toutes les maisons arborent ainsi un drapeau vietnamien.

Thierry a écrit:

Quant au néo-haussmannien (enfin, certains aspects de l'haussmannien), la situation de Hanoï est particulière parce que la ville a conservé un important patrimoine architectural français, donc c'est des motifs familiers pour les Vietnamiens. De plus les maisons que j'ai vues révélaient un goût manifeste pour l'ornementation et l'architecture voyante. Un toit dans le style français, ça doit faire un argument de vente.

C'est justement ce qui m'interpèle, qu'un style si visiblement "francais" puisse être un argument de vente, l'objet d'un désir, et donc un vecteur d'identification et de représentation sociale. Cela traduit, pour moi, une certaine forme d'idéalisation du fait colonial. Dans un pays qui est passé au travers d'une sanglante guerre de décolonisation et qui s'est vécu, imaginé ou ideálisé, comme communiste, l'existence de ces bâtiments m'étonne. À priori, je m'attendais plutôt à un rejet de l'héritage colonial francais, qu'a l'intégration de certains de ses codes visuels dans la ville moderne.

Pour comparaison. Je réside actuellement à Kuala Lumpur et la société semble ici vouloir se définir en partie en opposition à l'Ouest - ou plutôt à ses particularismes culturels percus. On trouve dans les journaux et les discours politiques une dénonciation argumentée de la culture mondialisée, en faveur d'un renforcement et de la promotion de l'identité (islamique) malais. Il y a dans l'architecture contemporaine très peu de motif coloniaux, on est soit dans le plus pur style international, soit dans une forme arabisante. La ville en soit est au final assez consensuelle, rappellant nombre d'autres villes asiatiques.

samussas a écrit:

C'est justement ce qui m'interpèle, qu'un style si visiblement "francais" puisse être un argument de vente, l'objet d'un désir, et donc un vecteur d'identification et de représentation sociale. Cela traduit, pour moi, une certaine forme d'idéalisation du fait colonial. Dans un pays qui est passé au travers d'une sanglante guerre de décolonisation et qui s'est vécu, imaginé ou ideálisé, comme communiste, l'existence de ces bâtiments m'étonne. À priori, je m'attendais plutôt à un rejet de l'héritage colonial francais, qu'a l'intégration de certains de ses codes visuels dans la ville moderne.

Pour comparaison. Je réside actuellement à Kuala Lumpur et la société semble ici vouloir se définir en partie en opposition à l'Ouest - ou plutôt à ses particularismes culturels percus. On trouve dans les journaux et les discours politiques une dénonciation argumentée de la culture mondialisée, en faveur d'un renforcement et de la promotion de l'identité (islamique) malais. Il y a dans l'architecture contemporaine très peu de motif coloniaux, on est soit dans le plus pur style international, soit dans une forme arabisante. La ville en soit est au final assez consensuelle, rappellant nombre d'autres villes asiatiques.

Et moi je réside pour le moment en Corée (du Sud), où l'héritage colonial japonais est tabou, en raison du caractère très oppressif de cette colonisation et des réticences du Japon à reconnaître sa culpabilité. En Corée, ainsi, on ne dit guère que le Japon a mis en place les premières structures industrielles, et on insiste plus sur l'aide américaine dans les années 60 que sur l'aide japonaise (pourtant importante).

Et ce que tu dis de la Malaisie ne m'étonne guère, car le Premier ministre malais s'est rendu mondialement célèbre dans les années 1990 en lançant le débat sur les "valeurs asiatiques", qui n'auraient pas la même vision de la démocratie que les valeurs occidentales ; débat qui a resurgi sous une autre forme depuis le 7 janvier dernier...

Au Vietnam, j'ai eu l'impression (mais ma vision des choses est très, très superficielle) qu'il y avait une vision plus apaisée du fait colonial qu'en Corée (ou en Malaisie). Non pas qu'il soit ignoré ou nié. Beaucoup de choses ont été détruites par les Français et encore plus par les Américains. Il y a bien sûr une avenue Dien Bien Phu à Hanoi, des musées consacrés aux horreurs de la guerre du Vietnam, des livres, des avions impérialistes américains exposés suite à leur capture, etc.

Mais les Vietnamiens n'ont pas tenté de masquer les apports français, le quartier français de Hanoi est bien entretenu et fait figure de vitrine de la ville ancienne. Dans le Temple de la Littérature, un panneau descriptif indiquait que les Français, après une "guerre aggressive" en 1858, avaient miné le système traditionnel des concours administratifs, mais il disait ensuite que le système mis en place par les Français avait apporté des éléments "positifs et innovants" en préparant effectivement les élèves pour agir dans la société, alors que le système traditionnel n'enseignait que la littérature.

Au total, il m'a semblé qu'il y avait plus d'auto-satisfaction (culte de Hô Chi Minh, rappel des victoires du Vietnam contre les plus grandes puissances...) que de ressentiment, même à l'égard des "impérialistes" américains. Et pourtant, peu de pays ont souffert comme celui-là (la Corée, justement, peut lui être comparée).

Peut-être le développement économique est-il la priorité. Peut-être le gouvernement autoritaire étouffe-t-il tout débat. Et le fait d'avoir été vainqueur militairement contre tout le monde (victoire militaire contre deux des principales puissances occidentales, c'est un cas peut-être unique) doit donner une très forte estime de soi, qui permet d'aller de l'avant.

Mais on ne peut pas exclure un retour de ces questions-là plus tard. En Corée, c'est aujourd'hui que le ressentiment envers le Japon atteint son maximum. Et au Vietnam, je n'ai vu que la communication officielle, cadrée dans ses moindres détails ; je n'ai aucune idée de ce que pensent les gens.

Apparement, une partie au moins de l'intelligentsia hanoienne semble tenir l'héritage colonial francais en grande estime, au point de l'ensencer et de revendiquer que, "avant l'arrivée des francais, nous étions des sauvages". Propos de seconde main à prendre avec des pincettes, impossible de savoir combien de personne exactement pense comme ca. Par contre, j'ai toute confiance en ma source, elle travaille sur place dans le secteur culturel.

Je pense que tu as raison, sur pas mal de chose. Pour ce qu'elle m'en a dit, le ressentiment vietnamien semble plutôt se tourner vers la Chine.

samussas a écrit:

Je pense que tu as raison, sur pas mal de chose. Pour ce qu'elle m'en a dit, le ressentiment vietnamien semble plutôt se tourner vers la Chine.

Il y'a eu de grosses manifestations anti chinoises en mai 2014, exacerbées par le sentiment nationaliste anti-chinois qui règne, et largement poussées (Courrier International) par le gouvernement vietnamien.

Il faut aussi noter que les provinces du Nord Vietnam (avec les nombreuses ethnies, souvent non sédentaires telles les Hmong) a proximité de la frontière sont sous autorité spéciale, dépendante de l'armée (un touriste qui veut s'y rendre doit d'abord obtenir des autorisations auprès des militaires etc...)

J'ai aussi vu des panneaux de propagande, au bord des grands axes, affirmant l'appartenance au Vietnam de plusieurs îles également revendiquées par la Chine (c'est la même chose pour l'île Dokdo en Corée). Avec, sur la pancarte, une carte du Vietnam, les îles en question et, au cas où on n'aurait pas compris, un soldat en armes...