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Le Monde, 1/09/2006
Haro sur la pyramide
LE MONDE | 01.09.06 | 15h51 • Mis à jour le 01.09.06 | 15h51
L'architecte américain d'origine chinoise Ieoh Ming Pei pose, en avril 1999, devant la pyramide qu'il a imaginée pour marquer l'entrée du Grand Louvre à Paris.
ALEXIS DUCLOS
Ieoh Ming Pei est livide. Ce lundi 23 janvier 1984, l'immuable sourire s'est effacé de son visage. A 67 ans, l'architecte américain d'origine chinoise est un grand bâtisseur. Son travail fait autorité de Washington à Hongkong, de Boston à Singapour. Mais ce jour-là, à Paris, face à la Commission supérieure des sites et des monuments historiques, c'est l'humiliation. Il est venu présenter son projet pour le Grand Louvre, symbolisé par une spectaculaire pyramide de verre. L'hostilité est palpable. Quand Pei éteint la lumière pour projeter ses diapositives, la réunion vire au cauchemar. Remarques désobligeantes et critiques fusent, en français. Pei ne les comprend pas. L'interprète, en larmes, a cessé de traduire.
Le scandale de la pyramide vient de commencer. Tous les clivages s'y rajeunissent : anciens contre modernes, architecture contre patrimoine, droite contre gauche, Français contre le reste du monde...
(...)
"Pei ne voulait pas toucher au Louvre, se souvient Emile Biasini. Mais il voulait donner à son entrée souterraine du volume et de la lumière. En juin 1983, il m'a prévenu qu'il faudrait construire un élément en surface. Pendant tout l'été, Pei a recherché la meilleure forme. A l'automne, je suis allé à son agence à New York. Il m'a présenté une maquette du Louvre, puis il a sorti de sa poche un morceau de verre et l'a posé dans la cour Napoléon. C'était la pyramide. J'ai regardé. Puis j'ai appelé Mitterrand pour le prévenir."
Pourquoi une pyramide ? C'est la forme qui occupe le moindre volume, celle qui, pour un promeneur en surface, est la plus mobile. Celle-ci a les mêmes proportions que la plus grande des pyramides de Gizeh, en plus petit (21,6 mètres de haut et 35 mètres de côté). Le président donne son accord. La machine est lancée.
(...)
Mais, dans les journaux, la polémique fait rage. La pyramide alimente le courrier des lecteurs. "Nous voici obligés de subir le diktat d'un étranger. N'avons-nous pas, nous, Français, le droit de décider de notre environnement ?", lit-on dans Le Monde. Un autre lecteur raille François Mitterrand et "cette pyramide de pacotille, comme une verrue sur un noble visage, rendue plus dérisoire encore par l'obélisque tout proche grâce auquel un souverain de l'ancienne Egypte sut, lui, perpétuer sa gloire !" On décèle dans le symbole de la pyramide une manipulation des francs-maçons, on jure que la verrière comptera 666 carreaux, signe que le Malin n'y est pas pour rien.
Les journalistes ne sont pas en reste. Dans le Figaro, hostile au projet, Pierre Mazars dénonce "le gadget pyramidal de M. Pei". Au Monde, l'affaire tourne à la crise interne et entraîne le départ d'une des grandes plumes du journal, André Fermigier. Le brillant chroniqueur d'urbanisme et d'architecture est furieux contre ce projet de "maison des morts", titre de la chronique au vitriol qu'il publie dans l'édition datée du 26 janvier. Habitué à mener de dures batailles contre les projets d'aménagement de la capitale, André Fermigier est prêt à en découdre. Mais le reste du journal ne le suit pas dans ce combat.
Blessé, André Fermigier quitte Le Monde. Après un an de silence, il publiera, dans l'édition du 11 février 1985, sous le titre "Le Zircon", une ultime et longue plaidoirie contre la pyramide, une "cloche à fromage", "un entonnoir", qui "ne peut que retarder l'accès du public aux oeuvres, l'en détourner même au profit d'activités commerciales et subculturelles".
(...)
Le 4 mars 1988, à quelques semaines de la fin de son premier septennat, François Mitterrand inaugure sa pyramide, prouesse technologique érigée en un temps record. Elle est le premier symbole d'un Grand Louvre en gestation, chantier pharaonique de plus de 2 milliards de francs, marqué par des fouilles archéologiques homériques et une guerre des tranchées avec le ministère des finances, qui rechigne à quitter l'aile Richelieu.
Dix-huit ans après, victime de son succès, la pyramide est saturée. Cet été, I. M. Pei, à 89 ans, se penche à nouveau sur les plans du Louvre pour proposer des améliorations. Mais, pour lui, l'essentiel est fait. "Ce que beaucoup de gens n'ont pas compris, c'est que la pyramide n'avait pas grande importance, confie-t-il. Le plus important, c'est d'avoir unifié le musée. Auparavant, il y avait sept départements, des conservateurs qui se battaient. Mon travail a permis de créer un grand musée, le plus beau du monde. J'en suis très fier."
Grégoire Allix
L'article entier est sur le site du lemonde.fr
Article paru dans l'édition du 02.09.06
Hors ligne
BatiActu 06-10-2006
Pei livre un musée pour sa ville natale en Chine
http://www.batiactu.com/special/image.p … 32322.html
La ville chinoise de Suzhou inaugure le 6 octobre un nouveau musée d’art. Ses formes géométriques, aux couleurs blanc et gris, sont signées de l’architecte sino-américain Ieoh Ming Pei, né là-bas en 1917.
(...)
Le musée, d’une superficie de 15.000 m2, comprend 5.000 m2 d’espace d’exposition, un auditorium de 200 places, une bibliothèque destinée aux chercheurs et des jardins. Ses collections contiennent des bronzes et des jades datant de 2.500 ans à 500 ans avant Jésus-Christ, trouvés autour de la ville, ainsi que des peintures d’artistes locaux, réalisées sous la dynastie Ming.
http://www.batiactu.com/special/image.p … 32322.html
http://www.batiactu.com/special/image.p … 32322.html
L'intégralité de l'article sur:
http://www.batiactu.com/data/06102006/0 … 32322.html
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Stickyesman a écrit:
BatiActu 06-10-2006
Le concepteur, également auteur de la pyramide du Louvre à Paris, a ressenti ici le «besoin d’exprimer une architecture chinoise». Pour Jia Beisi, professeur d’architecture à l’Université de Hong Kong, «il intègre l’architecture vernaculaire à son style géométrique, avec ses tuiles grises et ses murs blancs». Les volumes sont relativement bas afin de s’adapter au contexte environnant, composé de résidences et de canaux.
Très sympa. J'aime bien le côté « empilement de cubes en 3D »...
avec en plus une forme d'ensemble et une cour qui évoquent l'architecture traditionnelle chinoise.
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